L'artiste polonaise Marta Banaszak présentait, vendredi dernier, son exposition picturale dédiée au savoir-faire musulman sur plus de dix siècles. Dans le cadre de la célébration des 55 ans de relations diplomatiques entre l'Algérie et la Pologne, le musée des Beaux-arts d'Alger, a abrité l'exposition "Architecture islamique" de l'artiste polonaise Marta Banaszak. Présent au vernissage, Azzedine Mihoubi, ministre de la Culture nous dira : "Cette exposition est l'occasion de constater que l'art s'inspire de l'histoire, et Banaszak a réussi à rendre compte de cela, en reprenant des œuvres du monde musulman, et son art qui date de dix siècles. Aussi, le choix a été porté sur cette artiste car elle a vécu en Algérie pendant quatre ans, et cet intérêt pour l'art oriental l'a ainsi amenée à faire cette exposition, dans le cadre des 55 ans de relations diplomatiques algéro-polonaises, qui sont basées sur la coopération et l'amitié." Composée de vingt-quatre œuvres, entre tableaux et gravures, l'exposition donnait à voir une panoplie de peintures représentant des éléments de la culture et architecture arabes, auxquels la Polonaise aura inclus quelques références de l'art slave. De l'Iran au Pakistan en passant par la Syrie, c'est le monde musulman à travers plusieurs siècles qui a été célébré. À cet effet, l'artiste nous confiera: "Pour mon doctorat à l'Académie des Beaux-arts de Varsovie, j'ai travaillé sur un ornement très présent dans l'architecture islamique, l'Ablaq, qui fut surtout développé dans l'Empire ottoman. C'était donc la base de toute ma démarche et de ma recherche intellectuelle. Cette technique consistait à couvrir les murs avec des pierres noires et blanches." Et d'ajouter : "En tant que graveure éduquée selon la tradition européenne, ce clash entre le noir et le blanc que l'on retrouve d'ailleurs dans la calligraphie japonaise et la culture chinoise, avec le symbole du yin et du yang, m'a beaucoup intéressée. J'ai alors exploré l'influence de l'art arabe, avec sa propreté et sa netteté, dans l'art occidental, notamment l'art optique des années 60-70. Les Polonais sont d'ailleurs choqués d'une telle modernité, développée par les musulmans il y a dix siècles déjà !" En effet, on voit bien l'intérêt porté par l'artiste à cette période faste du monde musulman, qui reprend, avec une technique et une précision absolues, des joyaux architecturaux, avec leur géométrie complexe, comme la profondeur et la perspective, à l'instar du caravansérail Khan Assad Pacha de Damas, représenté par une série de trois linotypies, en noir et blanc, dominée par l'horizontalité des lignes qui scient la totalité de leur surface. Des cercles, repris à l'infini par le pinceau de l'artiste, jouent avec la perspective du contemplateur. Corridor de la mosquée Shah Jihan (Iran), est une longue toile rappelant les œuvres psychédéliques du mouvement de contre-culture apparu dans les années 1960, avec ses cercles interminables au milieu et ses couleurs franches, qui contrastent avec des bords plus apaisés et leurs lignes nettes, remettant ainsi en ordre ce délicieux bazar pictural. Voulant aussi apporter sa propre touche à ce bel art, elle reprendra, à sa manière, le minaret de la mosquée Al Hakim du Caire, une construction datant de l'époque fatimide, dont la fontaine rose, située en plein milieu de la cour, sera dupliquée sur gravure (une technique qui consiste à creuser le support entourant un dessin réalisé au préalable, ndlr). À noter que l'exposition sera transférée au MaMO, et qu'un partenariat entre les deux pays est prévu dans le cadre de cet anniversaire, où seront organisées des rencontres culturelles, avec des ateliers de ballets, de musique, et des cycles de formation pour les étudiants des Beaux-arts, ainsi qu'une possible semaine du film polonais en Algérie. Yasmine Azzouz