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«Mais pourquoi ce n'est pas comme ça chez nous ?! »
#LibertéVENDREDI
Publié dans Liberté le 21 - 04 - 2017

Voilà quelques jours déjà que la campagne électorale des législatives prévues pour le 4 mai 2017 a débuté, les panneaux d'affichages dressés à chaque coin de rue en témoignent et suscitent un réel débat au sein de la société algérienne ainsi que des interrogations qui se résument à une phrase très récurrente : « Voter ? Mais à quoi bon ? .» Comme si ce n'était qu'une formalité qui n'apportera pas un réel changement.
Ce désintérêt vis-à-vis de la politique algérienne touche tout particulièrement les personnes à la fleur de l'âge. Les jeunes et la politique divorcent d'une relation qui n'a jamais existé. Mais quelle en est la cause ?
1 - Cette compagne rime avec spam
En effet, ça ne sert à rien d'harceler une personne qui n'a aucun intérêt à voter en l'incitant à le faire quand même. On en entend parler, un peu trop même, mais on n'y prête pas attention. D'autre part, il faut souligner que les panneaux massivement implantés dans les quartiers sont disposés d'une manière anarchique, allant parfois jusqu'à bloquer le passage aux passants.
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Ces derniers n'ont pas échappés aux actes de vandalisme. Les affiches sont ridiculement tagués et font l'objet de moqueries. Dans certaines régions, ces panneaux perçus comme étant indésirables ont même été détruits à maintes reprises, malgré les efforts acharnés de l'Etat dans le but de les remettre en place. Un autre cas isolé, celui d'une jeune artiste dont les dessins qui autrefois décoraient fièrement les rues de Bab El Oued sont maintenant masqués en raison du vote. Elle tient à en témoigner :
Radia Bouzidi : « Comment veulent-ils qu'on vote pour eux pour qu'ils nous gouvernent alors qu'ils nous détruisent ? Je suis fière de mon pays, j'aime le voir propre, ordonné, avec des ruelles joyeusement décorées par la main de son peuple. Je refuse que mon art soit dissimulé, je refuse que leurs têtes le remplacent »
2- Ne pas s'intéresser à ces élections ne veut pas dire « être totalement désintéressé de la politique »
Les jeunes comparent les élections en Algérie et celles se déroulant à l'étranger de la même façon qu'ils comparent les séries américaines avec les feuilletons locaux. Ennuyeux, répétitifs, sans surprise et insensés sont les mots qui reviennent le plus souvent, les fans fidèles de House of Cards peuvent le confirmer. La politique en Algérie n'est pas prise au sérieux pour la simple raison que elle-même n'est pas sérieuse, ou du moins, les politiciens ne font pas d'efforts pour qu'elle le soit. La plupart préfèrent suivre de très près les élections en France, ou aux USA, car les débats sont riches et font durer le suspense. Elles donnent réellement l'impression que les candidats se livrent une bataille sans merci. Les politiciens algériens quant à eux, manquent cruellement de charisme, de dynamisme et ne savent pas capter l'attention des plus jeunes, ces derniers veulent de l'action, des débats intéressants, captivants, à couper le souffle. Ils veulent avoir affaire à un personnage fascinant qui sait s'adresser à eux et les convaincre, mais pour l'instant «c'est mort».
3- Le manque de confiance
Il y a une rupture de confiance entre le peuple et ses dirigeants. Les élus promettent beaucoup, mais, une fois arrivés au sommet, ne concrétisent jamais leurs idées. De ce point de vue, on peut dire que les jeunes s'intéressent à la politique algérienne, mais s'en méfient, et pour cause! Voici le témoignage d'un étudiant qui ont requis l'anonymat: « Moi personnellement je ne vote pas, ça ne veut pas dire que ça ne m'intéresse pas, je ne veux pas voter pour la destruction de mon pays en donnant le pouvoir à un homme qui ne tiendra pas ses promesses et qui préférera s'enrichir et s'enraciner pour garder sa place. »
Et puis, il y en a d'autres qui pensent que le vote n'est qu'une vulgaire mascarade. Que l'on vote ou pas, le résultat reste le même. Ce n'est que pour sauver les apparences.
4- Voter pour le meilleur, ou voter pour « le moins pire »!
Les jeunes ne votent pas tout simplement parce qu'ils ne savent pas pour qui voter : « Lui, elle ou l'autre, c'est pareil». Et puis, on peut dire qu'il est difficile de s'identifier à une personne qui a plusieurs années de plus que nous, en particulier si elle ne met pas en avant les sujets qui nous concernent. Pour attirer l'attention des jeunes, il faut leur adresser des discours qui nourrissent leurs intérêts et aborder des thèmes qui les touchent de très près comme l'éducation qui est déjà en chute libre et les problèmes auxquels les étudiants font face ainsi que ceux liés à l'austérité qui fait rage et bien d'autres.
5- Le manque de communication
Les jeunes de nos jours délaissent l'information présentée à la télé, ou dans les journaux, et préfèrent se réfugier dans le Web. Toutefois, ils ne se connectent pas aux réseaux sociaux afin d'obtenir des nouvelles. Pas tous du moins. Résultat, ils ne savent pas grand-chose à propos des élections, à part que c'est pour bientôt. Par ailleurs, les jeunes ont une image assez péjorative de la politique ici en Algérie. Demandez même à un enfant qui n'a aucune notion en politique la cause de tous les maux dont souffre le pays en période de crise, vous entendrez toujours « E'doula ». L'Etat est toujours pointé du doigt. Parfois même sans arguments. On sait juste que c'est de leur faute à eux. Comme on dit la culture « c'est comme ça », c'est automatique, on a une idée implantée en tête, celle que la politique chez nous est nulle, alors on ne préfère pas en entendre parler. Cela dit, même dans les pays où on pense que tout va bien, ce n'est pas toujours le cas. Et c'est là que les médias interviennent, pour donner une bonne impression et une image préfabriquée qui poussera le jeune algérien passionné de politique (ou pas) à se dire : «Ah ! Mais pourquoi ce n'est pas comme ça chez nous ?! »
Rania CHAIB
(Soleil HEC/Rédaction Numérique de "Liberté")


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