Nouvelle preuve, si besoin est, de la remise en cause enclenchée de l'héritage Bouchouareb, son successeur annonce avoir installé des groupes de travail pour procéder à une nouvelle évaluation des différents dossiers en suspens. Le ministre de l'Industrie et des Mines, Mehdjoub Bedda, revient à la charge et menace les constructeurs automobiles algériens qui n'honoreront pas leurs engagements à se conformer au prochain nouveau cahier des charges. Dans un entretien accordé à TSA, le ministre a clairement exigé des constructeurs "de s'aligner sur la politique du gouvernement". Mais que compte faire M. Bedda pour recadrer les constructeurs ? D'emblée, il révélera que le gouvernement "va fixer un quota pour la production". "Plus le taux d'intégration est élevé, plus nous autoriserons la production de véhicules (...) Celui qui n'améliore pas son taux verra son quota baissé (...) Nous insistons d'intégrer dans leur projet la dimension exportation. On lancera également un appel aux équipementiers pour les inviter à s'installer en Algérie", a-t-il expliqué. À la question de savoir si le gouvernement gèlerait les projets en cours, M. Bedda a affirmé que son département n'a nullement l'intention "de bloquer qui que ce soit". Et de lancer une pique lourde de sens et qui a le mérite d'être aussi claire que pertinente. "Nous disons que les gens qui n'ont rien à voir avec le secteur ne devraient pas investir dans ce domaine (...) Malheureusement, il y a des personnes dont l'objectif principal est d'amasser de l'argent au détriment de l'intérêt général", a-t-il déploré. Quid du projet Renault Algérie Production (RAP) ? M. Bedda dira que son département procède, actuellement, à l'évaluation des taux d'intégration avancés par tous les constructeurs. Il se ravisera en avouant que "l'objectif n'a pas été atteint semble-t-il, puisqu'on a continué à importer les pièces pour fabriquer les voitures". Précisant qu'effectivement, "les kits pour le montage de véhicules sont inscrits dans la catégorie importations intermédiaires", le ministre assure attendre les chiffres "exacts" relatifs à la branche et qui devraient être livrés par le groupe de travail mis en place pour établir cette évaluation. "On ne veut pas bloquer les projets, mais lutter contre les formes d'importation déguisée", ajoute-t-il, indiquant que l'objectif de cette démarche est de relancer les concessionnaires pour qu'ils s'alignent sur le nouveau cahier des charges en préparation. "Des décisions vont être prises", promet-il d'ailleurs. En revanche, M. Bedda a rassuré à propos des projets en cours de négociations, comme celui du groupe PSA (Peugeot Citroën), et qui, selon lui, sont toujours d'actualité, en ce sens que "le gouvernement va continuer à discuter avec Ford, Peugeot, Nissan et d'autres constructeurs". "Bien au contraire, nous voulons travailler avec les grands constructeurs", a-t-il indiqué. Concernant les licences d'importation de véhicules qui tardent à voir le jour, le ministre a évoqué le phénomène de la surfacturation. "On veut aussi contrôler les prix pour surveiller la surfacturation (...) On contrôlera de très près les factures à l'importation. Si la voiture coûte 8 000 euros par exemple en Europe, il n'est pas normal que son prix d'achat soit le double chez nous (...) Des cadres du ministère s'en chargeront lorsque le groupe de travail aura achevé son évaluation." Par ailleurs, M. Bedda a évoqué l'affaire du blocage des zones industrielles. "Nous avons bloqué le projet en attendant de revoir les choses. On va étudier le dossier, zone par zone. Voir où sont réellement les opportunités d'investissement et où on peut créer de la richesse et de l'emploi." Le ministre s'est exprimé aussi sur le secteur privé en affichant son soutien "pour son développement". "Nous allons tout faire pour que le modèle de partenariat public/privé/étranger fonctionne", a tranché le ministre. Citant l'exemple de Peugeot, le ministre s'interroge : "Pourquoi Peugeot ou d'autres grandes marques ne font-elles pas un partenariat avec la SNVI par exemple ?" Au sujet du scandale d'El-Hadjar, M. Bedda avoue qu'il s'agit d'un problème de management. "Il y a un groupe de travail qui étudie la situation sur place. On verra par la suite les solutions dégagées", a-t-il assuré. Idem pour la filière du ciment, le ministre a révélé avoir mis à la retraite quelques responsables de groupes publics. "Le résultat est là : le prix du ciment a baissé. Le groupe de travail sur ce secteur rendra ses conclusions prochainement. Ce dernier définira avec exactitude les problèmes de cette filière", a-t-il souligné, justifiant, au passage, la mise à la retraite de plusieurs cadres placés par l'ex-ministre, Abdeslam Bouchouareb. "Il (Bouchouareb) a travaillé avec tout un staff. Nous avons constaté que les objectifs n'ont pas été atteints, que ce soit dans l'industrie ou dans les mines. Il est normal qu'on veuille donner un nouveau souffle au secteur", a expliqué M. Bedda. FARID BELGACEM