Les réponses du Premier ministre Ahmed Ouyahia, qui présentera aujourd'hui son plan d'action à l'APN, sont fortement attendues par l'opinion publique, les observateurs de la scène économique nationale ainsi que par la communauté des affaires nationale. Des précisions devraient être apportées selon des économistes sur la question de la planche à billets. Le document, note Mohamed Cherif Belmihoub, spécialiste de l'économie nationale, ne donne pas de détails sur le montant de l'argent qui sera émis par la Banque d'Algérie en vue de réduire le déficit du budget, la dette interne, et relancer l'investissement via le Fonds national d'investissement. Le Premier ministre, en outre, va sans doute répondre aux affirmations des experts sur l'impact du recours au financement non conventionnel ou planche à billets. Ces derniers craignent que cette mesure entraîne un appauvrissement de la population, conséquence d'une inflation (hausse des prix) à deux chiffres et une forte dévaluation du dinar. Autre détail : cette manne qui proviendra de la planche à billets servira "à éponger les dettes du Trésor vis-à-vis de la Banque d'Algérie et donc effacer les dettes du Trésor dues notamment au non-remboursement des montants inhérents aux bonifications d'intérêts accordés par l'Etat, en particulier à l'Ansej et l'Andi, et qui représentent aujourd'hui des montants très importants. En d'autres termes, on recourt à la planche à billets quand le Trésor n'est plus dans la capacité de rembourser ses dettes et quand la Banque centrale n'est pas indépendante. En fait, la Banque d'Algérie n'a pas le droit d'émettre cette nouvelle monnaie sans contrepartie en valeur ajoutée. La révision de la loi sur la monnaie et le crédit est justement prévue pour permettre au gouvernement de recourir à la Banque d'Algérie, en un mot, pour que cette dernière imprime de nouveaux billets pour renflouer les caisses de l'Etat. Ce qui ne peut se faire quand la Banque centrale est indépendante", explique Zoheïr Boudehri, consultant en stratégie économique. L'autre inquiétude : c'est qu'en l'absence d'une contrepartie productive, en euros ou en dollars, de cette nouvelle émission de monnaie, la mesure s'avère dangereuse eu égard à ces fâcheuses retombées. Le Premier ministre est donc également attendu sur la nécessité de relancer en parallèle l'appareil productif ou les exportations hors hydrocarbures. Un processus qui demande du temps. Les partis de l'opposition interpelleront sans doute le Premier ministre sur les risques que présente le recours à la planche à billets. D'autant que des alternatives moins dangereuses que la planche à billets existent : recours à de nouveaux emprunts obligataires, recours à la bourse pour les investissements des entreprises, forte taxation des produits de luxe, meilleure collecte des impôts, meilleure appréhension de l'assiette fiscale notamment la fiscalisation de l'informel ou le recours à l'argent de l'informel, mobilisation de l'argent de la diaspora, lancement du partenariat public-privé. Mais, là se pose un gros problème : un déficit de confiance. Tant que la confiance n'est pas rétablie entre les gouvernants et les gouvernés en Algérie, il ne faut pas s'attendre à ce que ces mesures alternatives puissent être mises en œuvre avec succès, d'où la propension du Premier ministre à privilégier la planche à billets, une option beaucoup plus facile, mais dont les risques sont énormes. Cette mesure pourrait embraser le front social. K. Remouche