Pas moins de trois ministres algériens ont tenu à marquer hier leur présence au Colloque international intitulé "Le front du Nord. Des Belges et la guerre d'Algérie (1954-1962)" qui s'est déroulé à la Bibliothèque nationale d'El-Hamma. Après l'allocution d'ouverture de Son Excellence Pierre Gillon, ambassadeur de Belgique à Alger, c'est à Azzedine Mihoubi, ministre de la Culture, de prendre parole en premier pour souligner "l'importance qu'accorde l'Algérie à la récupération des éléments indicatifs de son histoire". Lui emboîtant le pas, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, n'a pas manqué de rendre hommage aux efforts personnels de l'ambassadeur de Belgique ainsi qu'aux autres parties "qui ont œuvré à donner à cette histoire la place qu'elle mérite". Quant au ministre de la Communication, Djamel Kaouane, celui-ci a appelé "à entretenir cette magnifique passerelle mémorielle entre l'Algérie et la Belgique". S'ensuivra alors l'introduction historique par maître Ali Haroun, ancien membre du HCE, pour qui "cette journée est historique". Didactique à souhait, Ali Haroun a expliqué le caractère exceptionnel de cette rencontre s'agissant "d'une minorité d'une minorité" belge qui a pris fait et cause pour la Révolution algérienne, d'autant que la Belgique officielle et même l'opinion belge s'étaient rangées à l'époque derrière la France coloniale. Il rappellera, à ce sujet, que Ferhat Abbas, porte-parole du FLN, ainsi qu'Ahmed Francis avaient été expulsés de Belgique pour "activité à caractère politique inopportune". Le témoignage d'Ali Haroun sera ponctué par plusieurs anecdotes où il évoquera ces grosses individualités que furent Luc Somerhausen, connu sous le nom de guerre "Alex", chef du réseau Jeanson en Belgique, et maître Serge Moureaux, responsable du collectif des avocats belges du FLN, dont l'épouse, Henriette, était, hier, présente dans la salle, émue aux larmes. Cette intervention, du reste très intéressante, sera, par ailleurs, interrompue par l'arrivée d'un "invité-surprise", en l'occurrence Omar Boudaoud, chef de la Fédération de France du FLN. Ali Haroun ne tarira pas d'éloges à l'égard de son "chef" qu'il a présenté à l'assistance comme le président de la dernière réunion du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA) tenue le 6 juin 1962. Sur le plan académique, c'est Paul-Emmanuel Babin, un jeune historien de la guerre d'Algérie en Belgique et dans le nord de la France, doctorant en Histoire du droit à l'université de Lille, à qui est revenue la délicate mission d'aborder cette histoire méconnue de Belges qui ont aidé, au péril de leur vie, les Algériens et le FLN durant la guerre de Libération nationale. Mais "à tout seigneur tout honneur", c'est à Hugues Le Paige, un journaliste à la Radio-Télévision belge francophone (RTBF) à qui revient le mérite d'avoir mis au grand jour cette histoire en interrogeant pas moins de 25 acteurs de l'époque dont certains sont décédés depuis dans le cadre de son film documentaire intitulé Le Front du Nord. Des Belges dans la guerre d'Algérie (1954-1962) qui sera projeté au public. Dans sa présentation au public, et s'agissant de ses motivations quant à son initiative, le réalisateur avouera que jeune lycéen, âgé de 16 ans, la guerre d'Algérie avait constitué, à titre personnel, son premier engagement politique. La séance de l'après-midi a consisté en une table-ronde à laquelle ont pris part les "moudjahidine" et les "moudjahidate" venus de Belgique, en l'occurrence Henriette Moureaux, Suzy Rosendor, Adeline Liebman, Anne Somerhausen, Marc Rayet et Mateo Alaluf. À signaler, en outre, la présence à ce colloque de nombreuses personnalités à l'image, notamment, d'Abdelwahab Derbal, président de la Haute instance indépendante de surveillance des élections, Xavier Driencourt, ambassadeur de France en Algérie, et Mgr Henri Tessier, ancien archevêque d'Alger. Mohamed-Chérif Lachichi