Selon la Cnas, l'Etat débourse plus de 27 milliards de dinars pour la prise en charge de 514 maladies, comme la tuberculose professionnelle (14%), les dysphonies (8%) et autres sinistres. Le directeur général de la Caisse nationale des assurances sociales (Cnas), Hassan Haddam, a tiré la sonnette d'alarme à l'ouverture, hier, des travaux du premier Congrès international de prévention des risques professionnels qui se déroule au Palais des expositions. Qualifiant la situation de "préoccupante", M. Haddam a appelé les experts présents à cette rencontre "à trouver des solutions, des outils et des mécanismes urgents afin de les suggérer à l'ensemble des opérateurs économiques, c'est-à-dire aux employeurs, pour prévenir les risques professionnels, juguler les accidents de travail et déployer des moyens qui permettraient de faire face aux maladies en milieu professionnel". Interrogé par nos soins sur les maladies émergentes dans le monde du travail et qui causent des infirmités et des décès, M. Haddam a affirmé que la surdité (25%) constitue la maladie principale en milieu professionnel, notamment dans le secteur de l'industrie où les normes sonores sont au-delà de celles fixées par la réglementation en vigueur. En plus du plan physiologique, la surdité affecte le côté psychique de l'employé, avec autant de facteurs aggravants et à hauts risques. Dans son étude, M. Razk-Allah, professeur en médecine de travail au laboratoire de recherche en santé et environnement à l'université d'Oran, a donné des indicateurs très inquiétants. Il dira que les secteurs industriels où les salariés sont exposés à des niveaux supérieurs à 85 décibels sont l'industrie du bois et du papier (57%), du textile et du cuir (55%), l'imprimerie (53%) et le verre (52%). Selon cette étude, 19% des salariés qui activent dans ces secteurs sont exposés à des niveaux supérieurs à 90 décibels, alors que les personnels qualifiés subissent des niveaux supérieurs à 85 décibels. Par ailleurs, les cancers professionnels ont sensiblement évolué entre 2010 et 2014, selon M. Haddar, professeur en médecine du travail à l'hôpital de Rouiba. Il ressort, sur les 15 travaux réalisés en Algérie et les 26 références répertoriées, que les études réalisées au centre, à l'est et à l'ouest du pays, font état de découvertes d'agents cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques. Ils sont de l'ordre de 7,2 dans les wilayas du Centre, de 13,3 à l'Est et de 20,7 à l'Ouest. Et si certains employeurs demeurent réfractaires à la loi régissant la protection en milieu professionnel, il est clair que plus de 80% des entreprises ne respectent pas les normes du protocole HSE (hygiène, sécurité et environnement). Selon des statistiques récentes, en plus des 74 500 entreprises polluantes, ce sont plus de 80 000 autres entreprises, de petites et moyennes tailles, qui n'exigent pas de leurs employés l'application des normes de sécurité et du management. Ce qui impacte fatalement sur leur santé. En ce sens, la Cnas a recensé une moyenne quotidienne de 2 555 000 indemnités journalières liées aux accidents et aux maladies professionnelles. Et si les accidents ont sensiblement baissé à près de 52 000 cas, dont 533 sinistres mortels, notamment dans le secteur du bâtiment (43% mortels), il n'en demeure pas moins que les maladies prennent de l'ampleur et mettent à mal le Trésor public et la Cnas. Pour illustrer la stratégie de la Cnas, notre interlocuteur citera le cas des secteurs de la sidérurgie, du bâtiment où encore de la métallurgie où le nombre de sinistres a baissé de 70%. Selon M. Haddam, l'Etat débourse plus de 27 milliards de dinars pour la prise en charge de 514 maladies, comme la tuberculose professionnelle (14%), les dysphonies (8%) et autres sinistres. Evoquant l'année 2017, M. Haddam a indiqué que la Cnas a mobilisé 19 milliards de dinars durant la période allant de janvier à fin septembre. Du reste, la Cnas a mené en 2015-2016 une enquête qui a touché plus de 500 entreprises sur la déclaration des procédés de travail susceptibles de provoquer des maladies professionnelles. Mieux, cette institution s'est même rapprochée de 203 centres de formation professionnelle pour sensibiliser près de 20 000 stagiaires et apprentis et près de 100 formateurs sur les bonnes pratiques de prévention des risques professionnels. Cette approche a valu à la Cnas le certificat de mérite de bonnes pratiques de l'Association internationale de la sécurité sociale (AISS) en 2017. Signalons, enfin, que ce colloque, auquel participent 600 personnes, sera sanctionné, demain lors de sa clôture, par une série de recommandations. FARID BELGACEM