Farid Bedjaoui et ses deux frères, Réda et Ryad, ont investi plus de 17 millions de dollars dans des propriétés de luxe au Québec. Des proches de despotes africains ont investi plus de 30 millions de dollars dans l'immobilier au Québec. L'avocat français et fondateur de l'organisation anticorruption Sherpa, William Bourdon, a déposé plainte contre une vingtaine de personnes proches de dirigeants, actuels ou anciens de six pays africains, dont l'Algérie. C'est ce que révèle une enquête du Journal de Montréal publiée jeudi. L'avocat anticorruption qui a été à l'origine de la saisie des biens et des avoirs du vice-président de Guinée équatoriale, Teodorin Obiang, estime qu'il y a suffisamment de preuves pour enclencher des enquêtes sur la façon dont ces investissements de dirigeants africains ont été financés. M. Bourdon presse aussi la GRC (police fédérale) d'enquêter sur les professionnels du droit, juristes et notaires, qui ont facilité les procédures aux "investisseurs" africains pour acquérir leurs propriétés de luxe. Des biens immobiliers, évalués à des dizaines de millions de dollars, qui ont été acquis souvent sans hypothèque (prêt bancaire). L'avocat auteur de la plainte y voit des opérations de blanchiment d'argent, rien de moins. Six pays sont concernés par la dénonciation de l'organisation Sherpa : l'Algérie, le Burkina Faso, le Gabon, le Congo-Brazzaville, le Sénégal et le Tchad. Une enquête est demandée sur les neveux de l'ancien ministre des Affaires étrangères, Mohammed Bedjaoui. Farid Bedjaoui et ses deux frères, Réda et Ryad, ont investi plus de 17 millions de dollars dans des propriétés de luxe au Québec. Reda Bedjaoui devient actionnaire d'un immeuble résidentiel, Appartements Acadia inc., selon le registraire des entreprises du Québec. Auparavant, il avait acquis une résidence pour la bagatelle de 1,9 millions de dollars. Surnommé "Monsieur 3%" pour son rôle joué dans l'attribution de contrats de Sonatrach aux firmes étrangères, Farid Bedjaoui fait l'objet d'un mandat d'arrêt international lancé par l'Algérie. Dans le cadre du procès de l'affaire Eni-Saipem-Sonatrach ouvert à Milan, en Italie, le procureur Isidoro Palma a requis, la semaine dernière, huit ans de prison ferme contre Farid Bedjaoui qui est toujours en cavale et recherché par Interpol. L'affaire concerne le paiement par les dirigeants de l'entreprise italienne Saipem, filiale de la pétrolière ENI, de pots-de-vin de quelque 198 millions de dollars au facilitateur de Chakib Khellil, en l'occurrence Farid Bedjaoui. La valeur des contrats "arrachés" par l'entreprise italienne depuis 2004 avoisine les huit milliards de dollars. Y. A.