"Les bagnards algériens de Cayenne" est le titre de cet ouvrage qui vient de paraître aux éditions El-Amel de Tizi Ouzou. Son auteur est Mustapha Hadj-Ali, né le 15 octobre 1961, dans la région montagneuse des Ath Bouadou, une tribu perchée au pied de l'antique "Montus Feratus" et relevant anciennement du cercle de Draâ El-Mizan en Grande Kabylie, aujourd'hui, rattachée administrativement à la daïra des Ouadhias dans la wilaya de Tizi-Ouzou. En fait, cet opus de 176 pages retrace la tragédie du peuple algérien aux premières années de l'invasion française en Algérie. Selon son auteur, les faits se sont déroulés entre 1852 et 1938 quand des milliers d'Algériens furent déportés en Guyane française et notamment jetés dans les bagnes affreux de Cayenne. "C'est un défi que je viens de réussir grâce à mes lectures et mes recherches sur cette période ô combien sensible de notre histoire", dira l'auteur qui estime que c'est le premier ouvrage à l'échelle nationale qui vient à point nommé éclairer une partie de cette histoire oubliée, celle de nombreux Algériens injustement déportés hors de leur pays. "La Guyane française accueillit près de vingt mille ressortissants algériens dont près de la moitié y perdirent la vie. Cette catégorie de bagnards représentait le «droit commun», ceux condamnés pour vol qualifié, meurtre et tentative de meurtre, commis particulièrement sur des colons et dont l'origine était souvent la faim et l'arbitraire", écrit-il sur la quatrième de couverture de ce bel ouvrage. Très riche en enseignements et documentaires, ce manuel qui se veut un livre d'histoire appréciable donne au lecteur toute latitude de cerner ce sujet encore tabou quand on sait que certains de ces bagnards étaient injustement expulsés de leur terre pour d'autres délits liés à l'honneur ou encore leur implication dans des soulèvements contre l'ordre établi par la force coloniale. C'est ainsi que Mustapha Hadj-Ali choisit de procéder par chapitres comme dans une monographie. On y distinguera au total sept chapitres et une introduction portant sur "Les bagnes coloniaux" (pages 11 à 18), "La Guyane et son bagne" (pages 24 à 43), "Algérie : conquête-résistance-déportation" (pages 47 à 72), "Les condamnations au bagne" (pages 73 à 76), "Vie au bagne" (pages 85 à 128), "Les évasions du bagne" (page 141 à 162) et enfin "La fin du bagne" (page 167- page 172). Dans ce manuel d'histoire s'il convient de l'appeler ainsi, l'auteur offre aussi au lecteur tout un panorama d'illustrations montrant des évasions de forçats en plein océan, et ce, au péril de leur vie, la scène d'une exécution à la guillotine, des prisonniers arabes à Saint-Marguerite, le transport et les souffrances des bagnards ainsi que d'autres images de déportés exterminés par les maladies et des insurrections populaires qui engendrèrent la déportation de détenus politiques. À ce propos, l'auteur écrit à la page 91 que "les condamnés pour espionnage, trahison, révoltes et insurrections étaient envoyés au Diable et, jusqu'en 1870, ils étaient placés dans la catégorie des forçats, puis après les événements de la Commune de Paris en 1871, ils retrouvèrent leur statut de détenus politiques. Mais, contrairement aux métropolitains, l'Etat appliqua la politique de deux poids et deux mesures contre les insurgés de 1871 en Algérie que les conseils de guerre et les cours d'assises avaient condamnés à la déportation au bagne de Guyane hormis treize prévenus et une centaine environ parmi l'élite qui suivirent en Nouvelle-Calédonie leurs camarades arrêtés dans les barricades des rues parisiennes. Cette exception n'était qu'une façade pour tromper l'opinion publique internationale". Passionné d'histoire, de l'Algérie en particulier, notamment celle de la colonisation française, Mustapha Hadj-Ali, bien qu'il ne soit pas historien, s'est donc consacré à cette page d'histoire hideuse de la colonisation française et promet de livrer encore d'autres écrits et travaux liés à la même période si seulement l'occasion lui serait donnée de consulter les archives françaises. O. Ghilès Les Bagnards algériens de Cayenne, de Hadj Ali Mustapha, Editions El-Amel, 176 pages, Prix 600 DA.