L'idée de centre d'accueil dans les pays de transit revient à la surface. Mais sa mise en œuvre risque d'aggraver le drame des migrants et réfugiés voulant se rendre en Europe. Matteo Salvini, le ministre de l'Intérieur et nouvel homme fort de la politique italienne, a réitéré hier l'interdiction aux ONG d'accéder aux ports de la péninsule. "Alors que le navire Aquarius navigue vers l'Espagne (arrivée prévue aujourd'hui) deux autres navires d'ONG battant pavillon des Pays-Bas (Lifeline et Seefuchs) sont arrivés au large des côtes libyennes, en attente de leur cargaison d'êtres humains abandonnés par les passeurs", a déclaré sur Facebook M. Salvini, qui est aussi vice-Premier ministre. "Que ces messieurs sachent que l'Italie ne veut plus être complice du business de l'immigration clandestine, et ils devront donc chercher d'autres ports (non italiens) vers lesquels se diriger. En ministre et en père, je le fais pour le bien de tous", a ajouté M. Salvini. Le refus de l'Italie le 10 juin d'accueillir l'Aquarius, navire humanitaire avec plus de six cents migrants à son bord a plongé l'Europe dans une nouvelle crise politique sur la question migratoire. "Que le navire s'appelle Aquarius ou See-Watch 3 ne change pas grand-chose, nous voulons mettre fin à ce trafic d'êtres humains et s'il y a d'autres navires, d'autres ONG battant pavillon étranger, nous tiendrons le même raisonnement", a affirmé cette semaine M. Salvini. Une déclaration qui laisse la possibilité à d'autres bateaux, dont ceux de la marine italienne ou des gardes-côtes, de rejoindre les côtes italiennes avec des migrants secourus à leur bord. Tel sera le cas du navire de la marine américaine US Trenton, qui fait route vers un port italien non encore défini après avoir secouru en début de semaine une quarantaine de migrants dont l'embarcation avait fait naufrage à une vingtaine de milles des côtes libyennes. Un naufrage qui a coûté la vie à douze personnes, selon l'ONG See-Watch. Un autre volet de la crise migratoire en Europe porte le nom d'Aquarius, ce navire affrété par l'ONG française SOS Méditerranée qui s'est vu refuser cette semaine l'accès à un port italien avant que l'Espagne ne propose de l'accueillir à Valence. L'épisode a donné lieu à une crise diplomatique entre la France et l'Italie, le président français Emmanuel Macron dénonçant "la part de cynisme et d'irresponsabilité du gouvernement italien", ce dernier exigeant des excuses de la part de son voisin, estimant qu'il n'a pas respecté ses engagements en matière d'accueil. La tension entre les deux pays a semblé retomber vendredi à l'occasion d'un déjeuner à Paris entre le président Macron et le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte. "L'Europe a manqué d'efficacité et de solidarité", a déclaré M. Macron, M. Conte plaidant lui pour "un changement de paradigme en renforçant au plan européen le rapport avec les pays d'origine et de transit des migrants". "Nous devons éviter les voyages de la mort en créant des centres européens dans les pays de départ et de transit pour accélérer l'identification des migrants", a proposé le nouveau Premier ministre italien, proche du Mouvement 5 Etoiles (M5S, antisystème). R. I./Agences