Les pour et les contre la peine de mort s'affrontent. Chaque camp avançant ses arguments. Et c'est dans ce contexte, précisément et devant l'ampleur de l'émotion, que la justice s'est sentie obligée, par deux fois en quelques jours, de réagir. Le choc n'est pas près de s'estomper à Oran, et dans l'entourage de la petite Salsabil, enlevée le 18 août dernier puis violée et assassinée par un voisin âgé d'à peine 18 ans. Ce drame, qui a mis en émoi la population, a pris une autre dimension depuis la diffusion sur les réseaux sociaux d'appels enjoignant les citoyens à sortir dans la rue "main dans la main" pour réclamer l'application de la peine de mort, notamment pour les assassins et les violeurs d'enfants. Le rendez-vous avait même été donné après la prière de ce vendredi, à la mosquée Ben Badis d'Oran. Mais, suite à cette invitation, c'est le père de Salsabil qui est monté au créneau déclarant, par le biais d'une télévision privée, qu'il s'opposait à cette marche et que cet appel n'émanait pas de lui. Se démarquant nettement de cette initiative, largement relayée, le père refuse que le drame et le martyre de sa fille soient ainsi exploités par quiconque, attendant et demandant seulement que justice soit rendue dans cette affaire. Dès lors, il était très attendu de voir ce qu'il allait advenir de cet appel à manifester, certains internautes, de manière choquante, s'en prenant au père de la victime pour s'être démarqué de la sorte. Et au final, ce vendredi, à la mosquée Ben Badis, il ne se passera rien, et la sortie des fidèles, après la prière, se fera dans le calme. Il faut dire que les forces de police avaient pris leurs précautions avec un dispositif sécuritaire très visible tout autour du lieu de culte, des 4x4 également parqués dans les ruelles de la cité Jamel, faisant face à la mosquée, ont montré que la chose était prise aux sérieux. Au sortir de la prière, les fidèles avaient des regards craintifs, informés de l'appel à manifester, et constatant la présence policière importante. À Ben Badis, et d'autres mosquées d'Oran, le prêche de certains imams n'a pas fait l'impasse sur cette affaire qui ne cesse d'être évoquée et commentée dans tous les foyers oranais ainsi que dans les espaces publics. Pour certains de ces prêches, ce sont les fléaux sociaux que sont la drogue et l'alcool qui ont été pointés du doigt et seraient la cause de ces actes horribles, leurs auteurs n'étant pas dans leur état normal. Une approche qui ne satisfait pas certains citoyens qui attendent de la justice, des pouvoirs publics en général et de la société, que la question des crimes à caractère sexuel soit prise en charge dans toute sa complexité et que les réactions émotives sous le coup ne cache pas l'état des lieux, ou le fond du problème. À chaque nouveau crime d'enfant, la polémique enfle sur la nécessité ou non de rétablir la peine de mort, de mettre fin au moratoire du moins pour les crimes et viol d'enfants. Les pros et anti-peine de mort s'affrontent, chaque camp avançant ses arguments. Et c'est dans ce contexte, précisément et devant l'ampleur de l'émotion, que la justice s'est sentie obligée, par deux fois en quelques jours, de réagir. Le procureur général près la cour d'Oran a rendu publique, jeudi, une deuxième déclaration depuis la découverte du corps de Salsabil, en expliquant que la justice suivait son cours avec l'incarcération et la présentation des deux inculpés devant la justice. Pour rappel le corps de la victime a été retrouvé dans la nuit du 18 au 19 août dissimulé dans un sac en plastique, déposé près d'un garage au quartier Echouhada, à la périphérie d'Oran, une cité à quelques encablures de Haï El-Nour où vivent les parents de Salsabil. L'autopsie avait confirmé le viol, évoquant encore des traces de coups sur plusieurs parties du corps de la petite, et une mort par strangulation. D. LOUKIL