La visite de la chancelière allemande, Angela Merkel, avant-hier en Algérie, a permis de relancer le débat, au sein de la classe politique allemande, sur l'application du projet de loi sur le classement de l'Algérie et d'autres pays du Maghreb parmi les "pays d'origine sûrs". Au centre des questionnements, la notion de "stabilité", évoquée par le gouvernement Merkel pour justifier le rapatriement des migrants maghrébins en situation irrégulière vers leurs pays d'origine. Ainsi donc, les titres de la presse allemande n'ont pas manqué de rapporter dans leurs éditions respectives d'hier les "doutes" qui entourent les déclarations officielles de leur gouvernement, notamment celles de son porte-parole, Steffen Seibert, qui a affirmé sur twitter que "l'Algérie représente un facteur de stabilité régionale important en Afrique du Nord". Sceptique, la Deutsche Welle évoquera ainsi un partenaire (Algérie) plutôt "à l'avenir incertain", son destin étant intimement lié à celui du "vieux président (Abdelaziz Bouteflika, ndlr)". Mais la question du classement de l'Algérie, en tant que "pays d'origine sûr", a surtout prêté à débat chez les parlementaires allemands, plutôt de tendance gauche. C'est le cas, en particulier, chez le parti des Verts qui attire l'attention sur "des atteintes aux libertés, toujours en vigueur, contre les journalistes, les opposants et les homosexuels dans les pays du Maghreb". En effet, dans une déclaration à la Deutsche Welle, la députée européenne, membre de l'Alliance 90/Les Verts, Barbara Lochbihler, a fait remarquer que "lorsque nous observons ce que la Cour constitutionnelle fédérale a stipulé dans une décision de principe, concernant ce qui est nécessaire pour être reconnu en tant que pays d'origine sûr, nous devons aussi vérifier l'état de l'application de la loi, l'état des relations politiques globales, ainsi que l'état de la situation juridique (dans ces pays, ndlr). Et partant donc de ce principe, nous ne pouvons pas dire qu'il s'agit d'un pays d'origine sûr". De son côté, la vice-présidente du groupe parlementaire de la Linke (parti de gauche allemand) a critiqué, avant-hier à Berlin, la position du gouvernement allemand en affirmant que Merkel "confond la stabilité avec le silence de cimetière", faisant référence à la situation d'immobilisme que connaît l'Algérie actuellement. Elle saisira, d'ailleurs, l'occasion pour dénoncer la politique d'armement de l'Allemagne qui, selon elle, profite largement aux régimes répressifs, tels que l'Algérie. "C'est grâce à l'appui allemand à l'armement que le président Bouteflika agit de manière de plus en plus répressive contre les mouvements de protestation, les journalistes critiques et les activistes", explique cette dernière. Le projet de loi, qui devra être délibéré ce vendredi auprès du Parlement fédéral, suscite ainsi encore le doute, notamment à la suite des dénonciations d'Amnesty International qui accuse l'Algérie d'arrestations arbitraires "de manifestants pacifistes, d'activistes des droits de l'Homme, ainsi que de journalistes", répercute le Handelsblatt, qui émet des réserves en qualifiant le partenariat algéro-allemand de partenariat "à double tranchant". Un autre point qui ne manque pas d'être commenté par l'ensemble de la presse allemande est l'état de santé du "Père de la stabilité", pour ainsi reprendre le titre d'une dépêche de l'agence de presse allemande Deutsche Presse Agentur, largement reprise par les journaux électroniques allemands. Par le titre "Père de la stabilité", la DPA ironisait sur une expression rentrée dans le jargon politique allemand qui qualifie Angela Merkel de "maman de tous les problèmes". Enfin, la presse allemande, notamment la DPA, n'a pas manqué de souligner que la visite de leur chancelière en Algérie constituait pour les Algériens l'une des "rares occasions de vérifier l'état de santé de leur Président". Lydia Saïdi