La situation de l'agriculture dans la région de l'Est se trouve dans une situation critique. Seule une volonté politique pourrait l'en sortir. Il est temps de penser à “l'application d'un nouveau schéma de cultures qui prendra en compte la spécificité des terres, la mise en place d'un cadre juridique régissant les cotisations pour le développement et la recherche, l'encouragement et le soutien à l'agriculture pour lui permettre d'augmenter ses performances”, autant de suggestions pour remettre sur les rails une agriculture condamnée depuis des lustres “à refaire surface”. Les agriculteurs, par la voix du président de la Chambre de l'agriculture de Annaba, M. Chebbah, nous ont fait part de leur inquiétude face à un avenir incertain. “On est en train de découper l'agriculture en morceaux. Il y a une véritable action de déstabilisation. Les gens ont besoin de travailler dans la sérénité et les banques refusent l'instabilité”, déclare-t-il. Cette tentative de réunification du travail dans un esprit de soutien et de développement est illustrée par la création, il y a quelques mois, d'une coopérative de producteurs de tomates, qui a réuni 1 200 ha pour 29 agriculteurs, et qui commence à porter ses fruits. Cette dernière a récemment signé une convention avec l'Oaic pour la production de céréales de multiplications (semences) et a engagé des négociations avec trois transformateurs de tomate pour la production de 150 000 quintaux. Cependant, après une pluviométrie mortelle cette année, le système “obsolète” de drainage vers la mer des eaux de pluie, venant des cours d'eau de Guelma et Skikda et se déversant dans la plaine de Annaba, a compromis l'agriculture au lieu de la favoriser. “Nous n'avons pu planter que 2 000 ha de qualité moyenne au lieu des 5 000 prévus, avec des conséquences énormes : une perte de revenus pour 600 agriculteurs et 240 000 emplois journaliers ont été perdus. Il faut revoir ce système d'assainissement que des années de sécheresse ont dégradé”, déclare un des agriculteurs présents. Ce réflexe, lié à l'habitude de la sécheresse (800 mm de pluviométrie cette année, contre 300 et 400 les quinze années précédentes), s'est fait aussi ressentir au niveau du comportement des agriculteurs. “Une absence d'initiative pour profiter de l'opportunité qu'offre une pluviométrie favorable (avant les inondations de la plaine). Aussi, le fellah ne s'est pas, encore, adapté aux nouvelles données”, explique un autre. À la Chambre de l'agriculture, on estime que “le Fndra n'est pas le Coran !”. On doit le réorienter pour redonner un nouveau souffle à l'agriculture, tournée vers les cultures industrielles du soja, des agrumes, du tabac, du coton, du tournesol et de la viticulture, selon la nature des terres de chaque région du pays. De plus, il faut changer radicalement les mentalités archaïques liées à l'agriculture traditionnelle qui a privilégié l'idée du profit rapide, au détriment du développement, et s'engager résolument dans une nouvelle vision. “Il faut penser développement. En matière de production de tomate, par exemple, nous avons le rendement le plus faible du monde. Le prix de la tonne de tomates au niveau international (Chine) est aujourd'hui de 50 dollars. Si nous continuons à végéter, nous serons bientôt dépassés par l'importation du semi-fini, avec toutes les conséquences que cela va entraîner, comme la suppression de la main-d'œuvre en amont et en aval de la production.”La menace plane sur les emplois ; 70% de la main-d'œuvre agricole dans l'est du pays est en âge de la retraite. “Nous ne faisons pas du social, nous sommes appelés à nous mécaniser, de plus en plus, pour affronter la concurrence extérieure. Donc, il faudra diminuer la main-d'œuvre et nous comptons beaucoup sur les banques pour qu'elles diminuent le taux d'intérêt à l'achat des machines agricoles”, affirme un responsable de la Chambre de l'agriculture. Continuant sur sa lancée, il argue qu'“en France, la mécanisation intensive a réduit le nombre d'agriculteurs de 2 000 000 à 500 000”. En conclusion, les agriculteurs de l'Est revendiquent le droit d'être informés et associés aux débats sur l'adhésion de l'Algérie à l'OMC en ce qui concerne l'agriculture. Hafiza M.