Le bloc parlementaire du parti au pouvoir, Nidaa Tounès, a boycotté, hier, la plénière consacrée au vote de confiance au nouveau gouvernement remanié du Premier ministre, Youssef Chahed, qui agit en porte-à-faux avec le président tunisien, Béji Caïd Essebsi, depuis plusieurs mois, scellant une alliance tacite avec le mouvement islamiste Ennahdha. Selon Sofiane Toubal, le président du bloc parlementaire de Nidaa Tounès, les raisons de ce boycott sont liées à la non-application par le gouvernement des décisions des assemblées générales, concernant surtout la prolongation du mandat de l'instance Vérité et Dignité en mars 2018. Le parti de Béji Caïd Essebsi est opposé à cette prolongation et a affirmé aussi qu'il n'y a aucun ministre issu de Nidaa Tounès dans le gouvernement remanié. Mais ce boycott n'a aucune influence sur le vote puisque Youssef Chahed bénéficie du soutien d'Ennahdha de Rached Ghannouchi, dont le parti dispose d'un bloc parlementaire de 68 députés, auxquels s'ajoutent ceux de la nouvelle Coalition nationale (40 députés) et d'Al-Horra de Machrou Tounes (14), alors que Nidaa Tounès est mis en minorité avec 38 élus. "Ce gouvernement va passer. Il bénéficie de la majorité parlementaire, c'est une évidence. Cependant, le Front populaire votera contre lui comme d'habitude", a déclaré, dimanche, la députée du Front populaire, Mbarka Brahmi, la veuve du défunt militant assassiné Mohamed Brahmi, sur les ondes de la radio Mosaïque FM. Le remaniement, annoncé la semaine dernière, a soulevé un tollé et a été vivement critiqué par le président tunisien qui affirme n'avoir pas été consulté. Des voix ont crié au complot et à un coup d'Etat orchestré par le caméléon politique Ennahdha qui, tout en affichant son soutien au président tunisien, s'allie à Youssef Chahed, dont les ambitions politiques s'affirment de plus en plus. Il est aussi devenu clair qu'Ennahdha est en train de réussir sa campagne sournoise pour l'affaiblissement de Nidaa Tounès pour avoir le champ libre lors de la présidentielle prévue pour fin 2019. L'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) affiche aussi son rejet de ce remaniement, affirmant, hier, par la voix de son secrétaire général adjoint, Monoem Amira, que "le gouvernement est occupé par le remaniement et refuse de négocier". Autrement dit, Youssef Chahed doit donc affronter, le 22 novembre prochain, la grève générale à laquelle a appelé l'UGTT pour dénoncer la persistance de la crise socioéconomique en Tunisie depuis sept ans. Face à toute cette opposition, Youssef Chahed reste imperturbable et défend ses choix et décisions. Hier, face aux députés, il a défendu, encore une fois, son bilan et réaffirmé son engagement à lutter contre la corruption, accusant certains cercles de chercher à le déstabiliser et à déstabiliser son gouvernement. "L'amélioration des moteurs de l'économie a favorisé la réalisation d'un taux de croissance aux alentours de 2,5%, au premier trimestre et de 2,8% au deuxième trimestre (2018)", a-t-il dit lors de son intervention, hier, soulignant que "la Tunisie aurait enregistré un taux de croissance meilleur, mais la confusion politique n'a pas permis d'atteindre cet objectif". Lyès Menacer