La polémique, qui commençait à poindre entre le gouvernement français et l'organisation Reporters sans frontières au sujet d'une rançon pour la libération de Florence Aubenas et Hussein Hanoun s'est brutalement dégonflée. Elle a éclos alors que la journaliste et son guide irakien venaient d'obtenir leur libération annoncée dimanche en milieu de matinée par le ministère des Affaires étrangères. Une libération qui a mis fin à 157 jours de captivité dans des conditions floues, et saluée avec beaucoup d'émotion dans un pays où la mobilisation n'a jamais faibli durant la traversée de ce long chemin de croix. Le président Jacques Chirac est intervenu en milieu de journée pour exprimer, dans une déclaration radiotélévisée, “le bonheur de la nation tout entière” et confirmer que les deux ex-otages étaient en “bonne santé”. La journaliste, qui a quitté Bagdad à 12h locales (10h à Paris) est arrivée en fin de journée à l'aéroport militaire de Villacoublay, dans la région parisienne, où elle a été accueillie par M. Chirac “au nom des autorités françaises”. Son avion s'était posé auparavant pour une courte escale à Chypre où l'ex-captive ou l'ex-otage a laissé entrevoir un bon moral et une bonne santé. On se rappelle que la seule vidéo diffusée après son enlèvement avait suscité beaucoup d'inquiétude en la montrant fatiguée, amaigrie et fragilisée. C'est dans l'île méditerranéenne que le ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, et le directeur du quotidien Libération, Serhe July, se sont rendus pour accueillir l'ex-otage. Hussein Hanoun est resté en Irak auprès de sa famille. Il est retourné, hier, dimanche chez lui, dans le centre de Bagdad, à bord d'une voiture de l'ambassade de France, où il a été accueilli par les cris de joie de son épouse, Souha, de ses quatre enfants et de ses proches. Habillé d'une robe traditionnelle blanche et de pantoufles noires, cet ancien pilote de chasse au grade de colonel dans l'armée de Saddam Hussein, est apparu éprouvé, le regard hagard, en descendant de la voiture. Pour saluer son retour selon la tradition, un mouton a été égorgé à l'entrée de la villa de deux étages. Sa femme s'est jetée à ses pieds pour les embrasser avant que Hussein Hanoun, le crâne rasé — comme il l'était le jour où il a disparu, il y a plus de cinq mois — n'entre chez lui, sans faire de déclaration. L'annonce de ces libérations a suscité des réactions immédiates de joie et de soulagement en France, dans sa famille, parmi ses confrères comme dans les milieux politiques et religieux. “On est tous extrêmement soulagés, heureux, et très, très reconnaissants à tous les services qui l'ont sortie de là”, a déclaré Sylvie Aubenas, la sœur de Florence. Le Premier ministre, Dominique de Villepin, a fait part de sa “très grande joie”, tandis que le président de l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, a exprimé la joie de “l'ensemble des députés”. L'ancien chef de la diplomatie française Michel Barnier, dont l'action en faveur de la libération des otages a été saluée par M. Chirac, a déclaré hier avoir le sentiment d'une “mission accomplie”. Sur les circonstances de l'enlèvement, de la détention et de la libération, il faudra sans doute attendre les prochains jours pour en savoir davantage. Seule certitude, le rôle actif joué par la DGSE, le service du contre-espionnage français dont le numéro un était dans l'avion qui ramenait la journaliste vers Paris Yacine KENZY