La création d'une "zone de sécurité" supposerait que les Kurdes acceptent de quitter les positions qu'ils occupent le long des 900 km de la frontière turco-syrienne. Le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré hier avoir évoqué avec son homologue américain Donald Trump l'établissement par Ankara d'une "zone de sécurité" en Syrie séparant la frontière turque des territoires aux mains d'une milice kurde. Ce dispositif a été discuté dans un entretien téléphonique lundi soir entre les deux hommes destiné à apaiser les tensions après que le président américain eut menacé de "dévaster" l'économie de la Turquie si celle-ci attaquait les combattants kurdes en Syrie. Au cours de cette conversation "extrêmement positive", Donald Trump "a mentionné une zone de sécurité d'une largeur de 20 miles, ce qui représente plus de 30 km, qui sera établie par nous le long de la frontière", a affirmé M. Erdogan dans un discours à Ankara. Le chef de l'Etat a ajouté que la mise en place de cette "zone de sécurité" pourrait se faire avec la "coalition internationale antijihadiste" regroupant une soixantaine de pays, dont les Etats-Unis, la Turquie ou encore la France. Depuis l'annonce, le mois dernier par Donald Trump, du retrait prochain des troupes américaines de Syrie, la Turquie et les Etats-Unis s'efforcent de trouver un accord qui les satisfasse mutuellement au sujet de la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG). Si Washington appuie les YPG contre l'organisation autoproclamée Etat islamique (EI), Ankara considère cette milice kurde comme un groupe "terroriste" et menace depuis plusieurs semaines de déclencher une nouvelle offensive contre ses positions dans le nord de la Syrie. L'annonce du futur départ des militaires américains a été bien accueillie par la Turquie, mais des déclarations de responsables américains évoquant l'établissement d'un lien entre ce retrait et la garantie de la sécurité des combattants kurdes ont suscité la colère d'Ankara. La Turquie pousse depuis plusieurs années à la création d'une "zone de sécurité" le long de sa frontière en Syrie, mais cette idée a jusqu'ici été rejetée, y compris par le prédécesseur de Donald Trump, Barack Obama. Cependant, cette option est revenue sur le devant de la scène lorsque le président américain a sommairement évoqué une "zone de sécurité de 20 miles" (environ 32 km) dans un tweet dimanche, une occasion que le gouvernement turc s'est empressé de saisir. "J'aborde ce sujet positivement, il est possible de travailler sur cette idée", a déclaré à la presse hier M. Erdogan, ajoutant, sans autres précisions, que la largeur de cette zone pourrait même être "étendue" au-delà des 20 miles évoqués par M. Trump. Le chef de l'Etat turc a par ailleurs refusé tout net la participation des YPG à l'établissement de cette "zone de sécurité" : "Ce sont des terroristes", a-t-il dit. Mais la création d'une telle zone supposerait que les YPG acceptent de quitter les positions qu'elles occupent le long des 900 km de la frontière turco-syrienne, dont la milice kurde contrôle une grande partie. "Comparer la présence de la Turquie en Syrie à celle d'autres pays est une insulte à l'histoire, à notre civilisation et à notre culture", s'est néanmoins exclamé mardi M. Erdogan, nostalgique de l'Empire ottoman. R. I./Agences