La guerre que se livrent les deux hommes peut dissimuler des appréhensions d'un "coup fourré" autour de dossiers compromettants. Ils ont fait bon ménage pendant longtemps avant que leur compagnonnage ne se transforme en scène de… ménage. Entre le chef d'état-major des forces armées, Ahmed Gaïd Salah, et l'ancien patron du DRS, le général Mohamed Mediene, dit Toufik, le torchon brûle. C'est du moins ce qu'il est permis de comprendre à travers la charge, d'une rare violence, mardi, de Gaïd Salah à l'encontre de celui dont le nom est revenu dans la bouche des Algériens depuis l'irruption de la dynamique populaire le 16 février dernier à Kherrata (Est de Béjaïa) contre la perspective d'un cinquième mandat. "J'ai déjà évoqué, lors de mon intervention du 30 mars 2019, les réunions suspectes qui se tiennent dans l'ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et afin d'entraver les solutions de l'Armée nationale populaire et les propositions de sortie de crise", a lancé Ahmed Gaïd Salah dans son discours devant les cadres de la 4e Région militaire. "Toutefois, ces parties, à leur tête l'ex-chef du Département du renseignement et de la sécurité, ont tenté, en vain, de nier leur présence dans ces réunions, et d'induire en erreur l'opinion publique, et ce, en dépit de l'existence de preuves irréfutables sur ces faits abjects", a-t-il dit. "Nous avons affirmé, ce jour-là, que nous allions dévoiler la vérité, mais ces personnes continuent à s'agiter contre la volonté du peuple et œuvrent à attiser la situation, en approchant des parties suspectes, et incitent à entraver les solutions de sortie de crise", a-t-il ajouté. Chose inimaginable, il y a peu, Gaïd Salah l'avertit et le somme de cesser ses "agissements". "À cet effet, je lance à cette personne un dernier avertissement, et dans le cas où elle persisterait dans ses agissements, des mesures légales fermes seront prises à son encontre." Lu au premier degré, Ahmed Gaïd Salah cherche à prendre à témoin le peuple algérien et, par ricochet, à obtenir son soutien, en suggérant qu'il s'emploie à trouver des solutions en phase avec les aspirations populaires, tandis que l'ancien patron des renseignements, dont on avait pourtant décrété qu'il était officiellement à la retraite, s'évertue à imposer un autre agenda. Faut-il prendre pour argent comptant les propos de Gaïd Salah ? En attendant une hypothétique réponse de l'ex-patron du DRS, auquel sont imputés plusieurs griefs et non des moindres, force est d'admettre que cette guerre déclarée par le chef d'état-major de l'armée semble charrier des relents d'un règlement de compte. Par bien des aspects, elle dissimule des enjeux dont les origines devraient remonter à plusieurs années déjà. Mais si l'on ne peut exclure que l'ex-patron du DRS cherche, à travers ses réseaux, à faire une "OPA" sur le mouvement populaire pour les besoins de pression sur ses adversaires et afin d'imposer une orientation, comme l'a accusé Saïd Sadi, en sous-traitant au profit du frère du Président déchu, comme l'a révélé l'ex-président Liamine Zeroual, il reste que la guerre peut dissimuler aussi des appréhensions d'un "coup fourré" autour de dossiers compromettants. Sinon comment expliquer l'avertissement ? Et pourquoi Gaïd n'explique pas comment l'ex-patron du DRS cherche à entraver les "solutions" ? Car, si "Toufik" est coupable de "comportements abjects", pourquoi Gaïd ne met-il pas sa menace à exécution ? Karim Kebir