Accusés notamment de "complots contre l'Etat", les trois hommes, présentés hier devant le procureur militaire près le tribunal militaire de Blida, ont été mis en détention, a-t-on appris de sources informées. Le frère conseiller de l'ancien président de la République, Saïd Bouteflika, le général Mohamed Mediène, dit Toufik, ancien patron du DRS, et le général Bachir Tartag, ancien directeur du Département de surveillance et de sécurité (DSS), l'héritier de l'ex-DRS, ont été arrêtés hier. Selon des sources concordantes, les trois anciens responsables ont été interpellés par les services de la Direction de la sécurité intérieure (DSI), relevant du DSS. Accusés notamment de "complots contre l'Etat", les trois hommes, présentés hier devant le procureur militaire près le tribunal militaire de Blida, ont été mis en détention, ajoutent les mêmes sources. Au moment où nous mettions sous presse, hier en début de soirée, aucune source officielle n'avait confirmé l'information, relayée du reste par la quasi-majorité des médias. Mais l'option de voir les trois personnages poursuivis en justice était dans l'air, depuis quelque temps déjà. Le chef d'état-major de l'ANP avait lui-même dénoncé, dans un discours prononcé le 2 avril dernier, des réunions qui visaient à "parasiter" le travail de l'ANP. "J'ai déjà évoqué, lors de mon intervention du 30 mars 2019, les réunions suspectes qui se tiennent dans l'ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et afin d'entraver les solutions de l'Armée nationale populaire et les propositions de sortie de crise", avait tempêté Gaïd Salah, accusant ces parties d'avoir nié la tenue de ces rencontres. "Toutefois, ces parties, à leur tête l'ex-chef du Département du renseignement et de la sécurité, ont tenté, en vain, de nier leur présence dans ces réunions, et d'induire en erreur l'opinion publique, et ce, en dépit de l'existence de preuves irréfutables sur ces faits abjects", a-t-il affirmé. En réponse, le général Toufik avait rendu public un communiqué pour nier ces rencontres. "Je n'ai jamais rencontré, ne serait-ce qu'une seule fois, le personnage des services de sécurité qui est cité comme ayant assisté à cette pseudo-réunion, depuis que j'ai quitté mes fonctions", s'était-il défendu, en référence au général Tartag. "(…) m'accusant d'avoir rencontré des agents étrangers pour évoquer des sujets relevant de la souveraineté nationale est une tentative délibérée de me porter préjudice", avait-il ajouté, en réplique aux accusations de contacts avec des agents français. Le lendemain, l'ancien chef des services secrets était contredit par l'ancien chef de l'Etat, Liamine Zeroual. Ce dernier confirme avoir rencontré, le 30 mars, le général Toufik. "(…) J'ai reçu, le 30 mars dernier, à sa demande, le général à la retraite Mohamed Mediene qui était porteur d'une proposition relative à la présidence d'une instance pour la gestion de la période de transition", a écrit l'ancien chef de l'Etat qui précisait que la proposition du général Toufik "émanait de Saïd Bouteflika". Le général Toufik "m'a confirmé que la proposition a été faite en accord avec Saïd Bouteflika, conseiller à la présidence de la République", a précisé Liamine Zeroual, qui n'a pas cité la présence du général Tartag, limogé au lendemain de la démission d'Abdelaziz Bouteflika. Dans un nouveau discours prononcé le 16 avril dernier, le chef d'état-major de l'armée avait accusé nommément le général Toufik et lui avait donné "un dernier avertissement". Tout en rappelant que malgré son démenti, l'ancien chef du DRS continuait à organiser des réunions, le chef de l'ANP l'avait menacé de poursuites judiciaires. "(…) Je lance à cette personne un dernier avertissement, et dans le cas où il persisterait dans ses agissements, des mesures légales fermes seront prises à son encontre", avait-il asséné. L'ancien conseiller et frère d'Abdelaziz Bouteflika avait également été vivement critiqué par le chef de l'ANP. Ce dernier avait ainsi accusé le frère de Bouteflika d'agir "en dehors de la loi" et d'être derrière des décisions "extraconstitutionnelles". Des affirmations confirmées ces derniers jours par l'ancien général à la retraite, Khaled Nezzar. Racontant un échange téléphonique entre eux, l'ancien ministre de la Défense révèle que Saïd Bouteflika voulait destituer le chef d'état-major de l'ANP. "Au son de sa voix, j'ai compris qu'il était paniqué. Il me dit que le vice-ministre de la Défense et chef d'état-major de l'ANP était en réunion avec des commandants des forces et qu'il pouvait agir contre Zéralda d'un instant à l'autre. Il voulait savoir s'il n'était pas temps de destituer le chef d'état-major. Je l'en dissuadai fortement au motif qu'il serait responsable de la dislocation de l'armée en cette période critique", raconte Khaled Nezzar.