Pour la troisième fois en quinze jours, le général de corps d'armée et vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd Salah, évoque publiquement des rencontres douteuses, visant à déstabiliser l'état-major de l'ANP. Dans le discours qu'il a prononcé hier à Ouargla, il a réitéré les accusations qu'il a portées, le 30 mars dernier, contre "des personnes suspectes" se réunissant "dans l'ombre pour conspirer autour des revendications du peuple et afin d'entraver les solutions de l'ANP et les propositions de sortie de crise". Il a désigné clairement l'ancien patron du DRS, le général à la retraite Mohamed Mediène (dit Toufik), comme chef de file de ce groupe. "Je lance à cette personne un dernier avertissement, et dans le cas où elle persisterait dans ses agissements, des mesures légales fermes seront prises à son encontre", a menacé le général major. Dans sa genèse, la démarche du général major manque de cohérence. Au lendemain du vendredi 29 mars marqué par une mobilisation citoyenne énorme contre l'application de l'article 102 de la Constitution comme il l'avait suggéré quatre jours plus tôt, Ahmed Gaïd Salah a parlé, pour la première fois, "d'une réunion tenue par des individus connus, dont l'identité sera dévoilée en temps opportun, en vue de mener une campagne médiatique virulente à travers les différents médias et sur les réseaux sociaux contre l'ANP". Dans la soirée de ce jour-là, une chaîne de télévision offshore atteste que la rencontre a regroupé le général à la retraite Toufik, un agent des services secrets français et l'ancien président de la République, Liamine Zeroual. Le 2 avril, le patron du DRS récuse formellement les accusations du chef d'état-major de l'ANP. Deux heures plus tard, Liamine Zeroual soutient avoir eu une entrevue avec le général Toufik qui lui a proposé, sur instigation de Saïd Bouteflika, de conduire la période de transition. Vers 19h, Ahmed Gaïd Salah revient à la charge en révélant l'existence d'un complot, incitant le peuple à adopter des alternatives au projet de l'ex-premier magistrat du pays, en dehors du champ constitutionnel, "afin d'entraver les démarches de l'ANP et ses propositions de sortie de crise et, partant, d'exacerber la situation et de la rendre plus compliquée. Tout cela est entrepris en coordination avec les entités non constitutionnelles". Il a affirmé détenir des preuves "attestant ces réalités malveillantes". En résumé, le chef d'état-major militaire accuse publiquement des parties identifiées de manœuvrer de telle manière à influer sur l'expression populaire et discréditer l'action de l'ANP, sans entreprendre paradoxalement la moindre mesure concrète contre les "conspirateurs". Hier, il a confessé implicitement que les menaces, qu'il a proférées contre "les personnes malintentionnées" dans ces deux discours précédents, n'ont pas induit l'effet escompté. Ce qui l'a amené à adresser directement au général Toufik "un dernier avertissement".