En grand nombre, les policiers ont usé de la matraque et des gaz lacrymogènes et procédé à de nombreuses interpellations. "Le rôle de l'armée est de protéger le pays et non de le gouverner", ont scandé hier les étudiants qui ont investi massivement les rues d'Alger pour une matinée de mobilisation à marquer d'une pierre blanche. Un 13e mardi de protestation durant lequel les étudiants ont eu droit à une sérieuse bastonnade de la part des policiers qui n'ont pas hésité à user des matraques et de gaz lacrymogènes pour les empêcher d'atteindre le Palais du gouvernement. Les étudiants ont entamé leur manifestation dès 10h30 depuis plusieurs endroits pour ne pas être bloqués. Le dispositif de sécurité, déployé à l'occasion, était impressionnant. Il occupait tour à tour l'esplanade de la Grande-Poste, l'entrée de la rue Asselah-Hocine qui mène à la wilaya ainsi que la rue parallèle pour accéder à l'APN. Mais c'était sans compter sur la riposte des étudiants qui, ayant déjà prévu ce scénario, avaient anticipé un nouvel itinéraire pour leur marche. "Nous nous dirigeons vers le Palais du gouvernement", nous indique un des meneurs de la marche tout en nous expliquant : "Nous réclamons le départ de Bedoui et de Bensalah et nous ne reconnaissons pas ce gouvernement qui ne peut, en aucun cas, organiser des élections." C'est d'ailleurs ce qui ressort clairement des slogans scandés par les étudiants et du contenu des banderoles déployées pendant cette marche. "Djeich chaâb khawa khawa ou Gaïd Salah mâa el khawana" (l'armée et le peuple sont frères et Gaïd Salah est avec les traitres), ont-ils scandé en chœur. Ou encore "Saimoun samidoun li nidam rafidoun", "Celui qui est la cause des problèmes ne peut être celui qui trouve la solution", pouvait-on lire sur les banderoles. Remontant la rue Dr Saâdane en direction du Palais du gouvernement, le cortège des étudiants s'est d'abord heurté à un premier cordon de policiers qui a fini par céder le passage. Le deuxième cordon, en revanche, a fait preuve d'une violence inouïe non seulement pour empêcher les étudiants d'avancer, mais aussi pour les éloigner carrément des lieux. Des scènes apocalyptiques de plusieurs étudiants à terre évanouis suite aux coups de matraque reçus en plus des gaz lacrymogènes notamment en cette chaude journée et en plein mois de Ramadhan où l'on a dénombré de nombreux blessés. Devant les cris et les pleurs, les policiers n'ont eu aucune pitié et n'ont pas hésité à procéder à plusieurs arrestations de manière très musclée. Les étudiants ont eu droit aussi à des insultes et à des moqueries de policiers et dans des gestes fous, certains d'entre eux iront jusqu'à pincer des filles avec une force incroyable et de la haine plein le regard. Les étudiants n'ont eu de cesse de répéter "Silmiya silmiya" (pacifique, pacifique), mais rien n'y fit. Les policiers de plus en plus nombreux ont continué à les rouer de coups de matraque jusqu'à les éloigner totalement de la "zone". Les étudiants ont été, alors, contraints de rebrousser chemin, prenant la direction de la Faculté centrale en passant par la rue Pasteur pour rejoindre ainsi les rues avoisinant la Grande-Poste dont l'esplanade est désormais interdite d'accès. Aux alentours, les étudiants se sont rassemblés en scandant des slogans en guise de messages à Gaïd Salah : "Ton rôle est aux frontières et non pas dans la politique", "Non aux élections avec la mafia", "Point de compromis avec l'armée". Avant de se disperser, les étudiants ont chanté l'hymne national tout en promettant de ne jamais s'arrêter. "Wallah ma rana habssine", ont-ils promis. Nabila SaIdoun