Bush se rend compte qu'il doit, d'une manière ou d'une autre, payer la note de son aventure en Irak. Il est même confronté à un vrai risque de défaite. L'insurrection islamiste est plus vigoureuse, chaque jour apportant son lot de carnages. Le spectre de la guerre civile menace avec des attentats contre pas seulement les Irakiens, qui travaillent à la reconstruction de leur pays, mais, de plus en plus, contre les chiites majoritaires et en pole position dans le pouvoir transitoire. Alors que le Pentagone n'est pas en mesure d'augmenter le nombre de ses soldats en Irak, que le mouvement de défection parmi les alliés de l'occupation s'amplifie et que les supplétifs irakiens, censés prendre la relève, ne sont pas prêts. Les alliés de Bush préparent leur sortie, à l'image de l'Espagne, qui avait ouvert le bal de la remise en cause. La Grande-Bretagne, le partenaire inconditionnel, annonce à son tour de retirer progressivement ses troupes dès l'automne. Face à la vague de terrorisme qui s'est abattue sur Londres, Tony Blair a même fini par s'interroger sur les tenants d'une guerre, que sa population n'avait cessé de condamner. Aux Etats-Unis, l'opinion montre des signes de lassitude et le désarroi commence à s'installer dans la majorité républicaine du Congrès qui ne se gêne plus pour houspiller Bush. La vague de scepticisme a même gagné les néoconservateurs, qui, pourtant, avaient prescrit l'invasion de l'Irak. Le calcul s'est avéré faux sur toute la ligne : l'Irak s'est installé dans un chaos incontrôlable et la théorie des dominos — devant faire souffler le vent de la démocratie dans la région — a volé en éclats. La déferlante terroriste s'est propagée partout autour de l'Irak, confortant les régimes locaux dans leur totalitarisme. Le doute ronge la Maison-Blanche qui, apparemment, ne sait plus quoi faire. Quitter l'Irak ou rester ? C'est le dilemme auquel est confronté Bush. Au Pentagone, le moment du bombage de torse est passé, Rumsfeld, pressé de voir sur les lignes de front la nouvelle armée irakienne, envisage de réduire de moitié son contingent pour le cantonner dans des bases, loin des populations irakiennes. Dans les deux cas, c'est un désastre pour Bush. Le bourbier vietnamien hante l'Amérique. Une certitude admise par tous, l'occupation américaine exacerbe les tensions alimentant l'insurrection, par ailleurs, multiforme. Au fait, pourquoi Bush est en Irak ? Les raisons invoquées se sont révélées des mensonges. Géostratégie ? C'est un flop. Les affaires ? Le pays, détruit et exsangue, est loin de se prêter aux faramineux contrats escomptés. D. Bouatta