Riyad et Abou Dhabi ont cherché à faire preuve d'unité face à la crise, mais les combats meurtriers de la semaine dernière entre leurs protégés à Aden, minent le front commun dans la guerre contre les rebelles chiites houthis. L'Iran a réaffirmé hier au plus haut niveau son soutien aux rebelles houthis du Yémen, à l'occasion de la réception d'un de leurs responsables par le Guide suprême, au moment où la coalition militaire anti-Houthis menée par l'Arabie Saoudite est confrontée à des dissensions. L'ayatollah Ali Khamenei a reçu mardi soir à sa résidence le porte-parole des Houthis, Mohammed Abdel Salam, et réitéré l'appui de son pays aux rebelles, qui contrôlent la capitale yéménite Sanaa et d'autres régions du pays depuis plusieurs années. "Je déclare mon soutien à la mujahidah (lutte) pour le Yémen", a-t-il dit, dans une référence apparente aux rebelles, selon un communiqué posté sur son site internet. Dans le même temps, il a dénoncé les "crimes" de la coalition conduite par l'Arabie Saoudite, qui intervient militairement depuis 2015 contre les Houthis, en appui au gouvernement yéménite. "L'Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, ainsi que leurs soutiens ont commis des crimes majeurs au Yémen", a déclaré le Guide, en dénonçant "l'indifférence du monde occidental vis-à-vis de ces crimes". "Ryad et Abou Dhabi cherchent à diviser le Yémen", a-t-il encore jugé. L'ayatollah Khamenei a appelé à des pourparlers pour mettre fin au conflit. La guerre qui fait rage depuis plus de cinq ans entre Houthis et camp antirebelles a fait des dizaines de milliers de morts, et le pays connaît la pire crise humanitaire du monde, selon l'ONU. Ces combats se sont doublés ces derniers jours d'affrontements sanglants entre forces de la coalition anti-Houthis dans le Sud. Ils ont opposé à Aden, la grande ville du Sud, des unités loyales au président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, soutenu par Ryad, à la force appelée "Cordon de sécurité", formée par Abou Dhabi et liée à un mouvement séparatiste sudiste. Riyad et Abou Dhabi ont cherché à faire preuve d'unité face à la crise, mais les combats meurtriers de la semaine dernière entre leurs protégés à Aden, minent le front commun dans la guerre contre les rebelles chiites houthis. Les divisions dans le sud du Yémen résultent en partie d'objectifs stratégiques divergents entre Saoudiens et Emiratis. Selon des experts, les Emirats considèrent depuis longtemps le Sud comme une base vitale pour étendre leur influence en mer Rouge et dans la Corne de l'Afrique. Ils ont financé et formé divers groupes qui leur sont aujourd'hui favorables. "Ce qu'on voit aujourd'hui, c'est un changement de la politique émiratie", a estimé Imad Hamrouni, géopolitologue, cité par des médias. Selon lui, "les Emirats arabes unis essayent de se retirer de ce conflit". Pour lui, ils veulent contrôler Aden, notamment par crainte des Frères musulmans qui opèrent un rapprochement avec les loyalistes du président Hadi. Leur grand voisin saoudien, monarchie sunnite wahhabite, considère de son côté les Houthis comme une menace existentielle à sa frontière sud, comparant ces rebelles yéménites au Hezbollah libanais, tous deux d'idéologie chiite.