La cheffe de l'exécutif hongkongais Carrie Lam a annoncé hier le retrait définitif de son projet de loi sur les extraditions, à l'origine de trois mois de contestation sans précédent dans l'ex-colonie britannique. Cette décision, qui constitue une reculade rare de la part du gouvernement pro-Pékin, pourrait cependant ne pas suffire à contenter des manifestants qui ont au fil de l'été élargi leurs revendications, pour dénoncer l'érosion des libertés et les ingérences grandissantes de la Chine dans les affaires de sa région semi-autonome. "Le gouvernement retirera officiellement le projet de loi afin d'apaiser complètement les inquiétudes de la population", a déclaré Mme Lam dans une vidéo diffusée par ses services. L'ex-colonie britannique traverse depuis début juin sa crise politique la plus grave depuis sa rétrocession à Pékin en 1997, avec des actions quasi quotidiennes, et notamment des manifestations monstres, qui ont parfois dégénéré en graves violences. Le retrait du projet de loi sur les extraditions -dont les manifestants redoutaient qu'il ne place la ville à la merci d'une justice chinoise politisée- est une des cinq demandes clés du mouvement. L'idée que Mme Lam puisse annoncer l'abandon définitif du texte, dont l'examen avait été suspendu après les premières manifestations, avait été annoncée en début d'après-midi par plusieurs médias hongkongais, puis confirmée par un député qui avait rencontré la cheffe de l'exécutif. Mais il n'est pas sûr que cette concession suffise à apaiser des manifestants qui demandent beaucoup plus. "Pas assez, trop tard", a déclaré Joshua Wong, qui fut en 2014 le visage du "Mouvement des parapluies" et qui a été arrêté brièvement la semaine dernière dans le cadre d'un coup de filet contre les grandes figures de la mobilisation actuelle. "Nous appelons aussi le monde à prendre garde à cette tactique et à ne pas se laisser tromper par Hong Kong et le gouvernement chinois. Ils n'ont en fait rien concédé, et une répression de grande échelle se prépare." Des commentaires furieux sont aussitôt apparus sur les différents forums utilisés par le mouvement pro-démocratie, soulignant notamment qu'un retrait du projet de loi ne mettait pas fin aux protestations. "Plus de 1 000 personnes ont été arrêtées, un nombre incalculable blessées", indiquait notamment un message largement diffusé sur l'application de messagerie Telegram. Les manifestants demandent notamment l'introduction du suffrage universel et l'ouverture d'une enquête indépendante sur l'usage de la force par la police. De son côté, Pékin avait semblé mardi vouloir calmer le jeu. Le porte-parole du Bureau des affaires de Hong Kong et Macao, Yang Guang, avait assuré que le habitants de l'île "y compris les jeunes étudiants", avaient le droit de manifester "pacifiquement". Mme Lam concentre actuellement la colère des manifestants en raison notamment de la froideur qu'elle a affichée ces trois derniers mois. R. I./Agences