Le chef de l'institution militaire a clairement ordonné l'interdiction d'accès à Alger, les vendredis, aux citoyens résidant dans les autres wilayas. à la veille d'un vendredi de mobilisation contre le régime, après la convocation du corps électoral, le chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, a dévoilé, dans un discours prononcé depuis la 6e Région militaire à Tamanrasset, un pan de mesures envisagées pour inhiber l'expression de rue. Désormais la circulation automobile en direction de la capitale ne sera pas ralentie par des barrages filtrants, mais carrément interdite aux véhicules dont les occupants sont soupçonnés vouloir participer aux marches hebdomadaires. "J'ai donné des instructions à la Gendarmerie nationale pour faire face avec fermeté à ces agissements, à travers l'application rigoureuse des réglementations en vigueur, y compris, l'interpellation des véhicules et des autocars utilisés à ces fins, en les saisissant et en imposant des amendes à leurs propriétaires." Au regard du commandement militaire, les citoyens, résidant dans les autres wilayas et qui viennent manifester à Alger, sont utilisés, par "les relais de la bande (…) pour amplifier les flux humains, sur les places publiques, avec des slogans tendancieux qui n'ont rien d'innocent". Il leur prête des velléités "d'induire l'opinion publique nationale en erreur avec ces moyens trompeurs pour s'autoproclamer fallacieusement porte-voix du peuple algérien". L'injonction du vice-ministre de la Défense nationale, motivée par une volonté de réduire quantitativement les marches dans la capitale et empêcher insidieusement les slogans qui lui sont hostiles ainsi qu'aux symboles du régime, s'inscrit, pourtant, en porte-à-faux avec des dispositions constitutionnelles, consignées dans le chapitre des droits. L'article 55 de la loi fondamentale énonce : "Tout citoyen jouissant de ses droits civils et politiques a le droit de choisir librement le lieu de sa résidence et de circuler sur le territoire national. Le droit d'entrée et de sortie du territoire national lui est garanti. Toute restriction à ces droits ne peut être ordonnée que pour une durée déterminée, par une décision motivée de l'autorité judiciaire." Le chef de l'institution militaire n'entrevoit visiblement pas la situation sous l'optique des droits constitutionnels de ses concitoyens, mais sous forme d'un complot. "Nous savions, dès le début de la crise, qu'un complot se tramait en secret contre l'Algérie et son peuple, nous avons dévoilé ses tenants et ses aboutissants au bon moment, de même que nous avons élaboré une stratégie efficiente exécutée par étapes, conformément à ce que nous permettent la Constitution et les lois de la République", a-t-il souligné hier, avant d'affirmer que le processus électoral, enclenché par la convocation du corps électoral pour le 12 décembre prochain, intervient "dans un climat de confiance et de transparence (…) à travers la mise en place de cette Autorité nationale (en charge des élections, ndlr), l'élection de son président et son installation avec ses cinquante membres, qui comptent parmi les compétences nationales connues pour leur intégrité et leur loyauté". Pour Ahmed Gaïd Salah, "il n'y a pas lieu, pour quiconque, de chercher des faux prétextes pour remettre en cause l'intégrité du processus électoral ou l'entraver".