C'est un véritable cri de détresse qu'ont lancé, hier, les chefs d'entreprise. "La réalité aujourd'hui est amère", a indiqué le président du Forum des chefs d'entreprise (FCE), Mohamed Sami Agli, lors de l'université d'été de l'organisation patronale, organisée à l'Ecole nationale supérieure de l'informatique à Alger. M. Agli a évoqué une situation extrême. "Les entreprises souffrent, et de l'autre côté on ne voit pas forcément de réactivité", a relevé le président du FCE. "Tous les jours nous perdons des entreprises et des emplois", a-t-il ajouté, regrettant l'absence d'action, qui "malheureusement" risque, encore "de s'accentuer". La crise que vivent les entreprises remonte à 2014, depuis la chute du prix du pétrole, mais, selon Mme Nacira Haddad, directrice générale de l'entreprise Incosyn, les difficultés des entreprises se sont exacerbées. "L'opération mains propres a eu un effet boomerang", a-t-elle estimé, relevant l'inertie totale qui caractérise l'administration, avec comme corollaire "l'absence de décision et d'interlocuteurs". Les entreprises font face, également, aux problèmes de financement et d'endettement. "Au niveau des banques publiques, c'est la panne. Il n'y a aucune prise de décision. On ne finance pas l'exploitation encore moins l'investissement", relève Mme Nacira Haddad. Concernant l'endettement, les entreprises sont confrontées à des difficultés sérieuses. Du coup le FCE plaide pour des moratoires avec les banques et les caisses de sécurité sociale. L'organisation patronale a évoqué, également la question de la commande publique, qui aurait pu jouer un rôle de levier de consolidation des entreprises. "20% du PIB est tiré par la commande publique", révèle le FCE, évoquant, aussi, la nécessité de réviser les dispositifs d'accompagnement à la création au développement des entreprises. Selon Mme Nacira Haddad, de 1991 à 2010, l'Etat a consenti plus de 50 milliards de dollars en assainissement des entreprises publiques. De 2010 à 2014, environ 20 milliards de dollars ont été consacrés pour les plans de développement des entreprises publiques, "90% d'entre elles sont incapables de pouvoir continuer leur fonctionnement et assurer leur développement". Autre constat : un million de mètres carrés de foncier dormants dans le secteur public. "Il ne faut pas diaboliser le privé", plaide le président du FCE, estimant qu'à "une situation exceptionnelle, il faut des mesures exceptionnelles". L'organisation patronale propose pour le traitement de l'endettement, la réactivation du dispositif du rééchelonnement des dettes fiscales des entreprises déjà mis en œuvre en 2012. Le FCE suggère d'appliquer un moratoire d'une année à deux années et l'étalement du principal, sur une période d'une à trois années, selon le degré d'endettement de l'entreprise. Le même dispositif pourrait être appliqué pour les dettes parafiscales. Le FCE souhaite, aussi, la réactivation du dispositif banques-entreprises, mis en place en 1996 en matière d'endettement bancaire. Pour le financement de l'investissement, l'organisation patronale juge nécessaire la prise de mesures à la fois contraignantes et incitatives aux banques à capitaux privés pour les amener à s'impliquer dans de le financement l'investissement productif. Pour les banques publiques, le FCE souligne la nécessité d'ouvrir le conseil d'administration à de l'expertise indépendante aux lieu et place de la composante de fonctionnaires actuelle déconnectée de la réalité économique. Il faut également mettre un terme aux injonctions extérieures pour la location des ressources. Par ailleurs, lors d'un point de presse le président du FCE a estimé, que le moment n'est pas opportun pour l'examen de l'avant-projet de loi de finances.