Le collectif de la défense s'est attelé à démonter toutes les accusations portées contre ses prévenus et surtout celle relative à la drogue. Onze manifestants arrêtés pendant les marches du hirak ont comparu, dimanche, devant le juge du tribunal de Zemoura, localité sise à une trentaine de kilomètres du chef-lieu de la wilaya de Bordj Bou-Arréridj. Arrêtés le 19 novembre dernier, ces jeunes, dont l'activiste et blogueur Brahim Laâlami — originaire de la région de Djaâfra et déjà sous contrôle judiciaire pour des faits en relation avec le hirak —, sont poursuivis pour attroupement non autorisé, incitation à attroupement non armé, entrave au travail de la commission des élections et possession de drogue à usage personnel. Les jeunes manifestants, qui ont reconnu avoir manifesté, ont nié catégoriquement l'accusation de consommation de drogue. "C'est un coup monté !", disent-ils. "Il ne touche ni à l'alcool ni aux drogues", a témoigné le père de Brahim Laâlami soutenu par un groupe d'habitants de Djaâfra qui s'est déplacé à Zemoura. "Nous sommes ici pour dire au juge et à tout le monde que nos enfants ne sont pas des criminels. Ils aiment leur pays et la liberté !", dira un autre parent. Dans son réquisitoire, le procureur de la République a requis 8 ans de prison ferme à l'encontre de Brahim Laâlami, 2 ans de prison ferme pour 3 hirakistes et 1 an ferme pour les autres accusés. Le collectif de défense, composé de 13 avocats, venus de toutes les régions du pays, s'est attelé à démonter toutes les accusations portées contre les prévenus et surtout celle relative à la drogue. "Il n'est pas concevable de procéder de cette façon pour arrêter et emprisonner un activiste. Lui coller une accusation de drogue, c'est mesquin et non fondé", dira un des avocats qui se demande pourquoi on n'a pas cherché à trouver le vrai comploteur ? Pourquoi ne pas enquêter à décharge ? Pourquoi ne pas entendre ceux qui les connaissent ? Les avocats ont aussi soulevé le point concernant le droit de manifester et les libertés d'expression et du choix politique. "Ces jeunes sont sortis pour réclamer un droit qui est celui de la liberté d'expression, de choisir son gouvernant, de veiller sur son pays et surtout de protéger ses acquis et son indépendance", dira Me Gharbi, un du collectif des avocats. "Le dossier d'accusation est vide, même les vidéos présentées ne montrent rien d'anormal. Des jeunes qui marchent sans entraver la vie quotidienne d'autrui", ajoute-t-il. "C'est un dossier politique et non pas juridique", précise-t-il. Après des heures de plaidoiries, le juge a annoncé que le verdict sera connu le 16 février prochain. Dehors, les hirakistes et les familles n'ont pas quitté la rue. À la sortie des avocats, les personnes venues soutenir les hirakistes ont scandé : "Bravo les avocats, nous sommes fières de vous !". Le procès a été marqué par l'organisation d'un sit-in de soutien aux prévenus. Dès les premières heures de la matinée, des hirakistes venus des quatre coins de la wilaya ont, en effet, organisé un sit-in devant le tribunal de Zemoura. La foule grossissait d'heure en heure pour réclamer la libération des jeunes hirakistes. "Libérez nos enfants", "Libérez Laâlami", "Nous ne quitterons les lieux qu'après la libération de nos enfants", scandaient les manifestants, tout en gardant le caractère pacifique de la protestation. Même dans l'après-midi, les manifestants n'ont pas cessé de crier : "C'est une honte d'empêcher les hommes libres de manifester", "H'na ouled Amirouche, marche arrière ma nwellouche, talbine el-houria" (Nous sommes les fils d'Amirouche, nous ne ferons jamais marche arrière, nous demandons la liberté), "La roue tourne, nous allons les évincer", ‘'Libérez la justice".