Bien qu'il soit primé sous d'autres cieux et acclamé autant par la critique que par le public, le long-métrage reste censuré et ce, depuis plusieurs mois déjà côté algérien, sans qu'aucune explication sur les tenants et les aboutissants de cette interdiction soit, à ce jour, fournie. Ce ne sont pas moins de deux distinctions que le film Papicha a raflées avant-hier soir, lors de la 45e cérémonie des Césars organisée par l'Académie des arts et techniques du cinéma en France. Le prix du meilleur premier film est revenu à la réalisatrice Mounia Meddour, tandis que celui du meilleur espoir féminin a été attribué à Lyna Khoudri, qui campe le rôle de Nedjma. Lors de cette soirée où le cinéma national a brillé malgré sa censure en Algérie, la réalisatrice a déclaré en recevant son César : "Papicha, c'est sept ans de travail. Il m'a fallu énormément de courage pour me décider à raconter cette histoire, cette histoire personnelle, cette histoire qui est douloureuse mais qui est aussi nécessaire. C'est un témoignage important du combat des femmes en Algérie et du combat des femmes de façon générale." Et d'ajouter : "Merci de nous remercier de l'autre côté de la Méditerranée, one two three, viva l'Algérie !", a-t-elle lancé sous les applaudissements de l'assistance. Mais bien qu'il soit primé sous d'autres cieux et acclamé autant par la critique que par le public, le long-métrage reste censuré et ce, depuis plusieurs mois déjà côté algérien. Son avant-première, programmée pour le 21 septembre dernier à la salle Ibn Zeydoun, ainsi que sa sortie commerciale, qui devait avoir lieu à partir du 22 du même mois, ont tout bonnement été annulées au dernier moment, sans explication officielle. Ni le ministère de la Culture, pourtant coproducteur du film, ni le Centre algérien du développement du cinéma (CADC) n'ont donné davantage d'explications sur les tenants et les aboutissants de cette censure, présentée comme une "annulation momentanée". Belkacem Hadjadj, cinéaste et coproducteur du film, déclarait dans une lettre ouverte publiée au lendemain de cette interdiction (voir l'édition de Liberté du 9 octobre 2019) que Papicha a été interdit de projection dans "l'opacité la plus totale, sans la moindre explication ni notification", alors que, dit-il, l'œuvre "dispose de tous les visas réglementaires algériens nécessaires pour sa distribution en Algérie". Il est à noter par ailleurs que ces deux récompenses viennent étoffer les nombreux prix déjà reçus lors du Festival du film d'Angoulême où il a reçu trois distinctions : Valois du public, Valois du scénario et Valois de l'actrice pour Khoudri. L'œuvre de Meddour a également été très remarquée lors de son passage au Festival de Cannes, dans la section "Un certain regard", en plus de sa récompense au Festival El-Gouna en Egypte et sa nomination aux Oscars pour le meilleur film étranger, bien qu'il n'ait, finalement, pas été retenu dans la short-list. Plus récemment, Meddour a remporté le prix Alice-Guy, une compétition qui "vise à mettre en valeur les réalisatrices en couronnant le meilleur film réalisé par une femme".