"Sans l'adoption de nouvelles mesures, les réserves seraient ramenées à 24,2 milliards de dollars, soit environ 6,1 mois d'importations à fin 2020", estime la Bm. L'Algérie doit faire face à un choc provoqué à la fois par une baisse de moitié des prix du pétrole, une crise de santé publique et les conséquences des bouleversements économiques à l'échelle mondiale à la suite de l'épidémie de Covid-19, relève la Banque mondiale dans son rapport de suivi de la situation économique de l'Algérie. Selon l'institution financière internationale, à 30 dollars le baril de pétrole en 2020, les recettes budgétaires totales diminueraient de 21,2%. Malgré la réduction des investissements publics (-9,7%) et de la consommation publique (-1,6%) prévue par la loi de finances pour 2020, le déficit budgétaire augmenterait pour s'établir à 16,3% du produit intérieur brut (PIB). Parallèlement, la baisse importante des recettes d'exportation (-51%) entraînera un creusement du déficit commercial qui s'élèverait à 18,2% du PIB et une détérioration du déficit du compte courant qui atteindrait le niveau record de 18,8% du PIB en 2020, malgré les mesures prises pour limiter les importations et circonscrire les effets de la faible demande intérieure. "Sans l'adoption de nouvelles mesures, les réserves seraient ramenées à 24,2 milliards de dollars, soit environ 6,1 mois d'importations à fin 2020", estime la Banque mondiale, dont les prévisions tablent sur une contraction de 3% du PIB cette année. Ce qui correspond à un recul de la consommation et de l'investissement privés, ainsi qu'à la chute des investissements publics, qui représentent 44% de la totalité des investissements. Aggravation des déficits Le rapport indique que les mesures visant à endiguer la crise de Covid-19 comme la restriction des déplacements et des rassemblements, auxquelles s'ajoutent les fortes incertitudes économiques, décourageront la consommation et l'investissement privés. Pour l'institution de Bretton Woods, les possibilités de réduction de la pauvreté qu'offre l'économie sont limitées, sur fond de croissance par habitant négative et de chômage chronique. Le taux de chômage s'est stabilisé à 11,4% en mai 2019, relève le rapport. Il est plus élevé parmi les femmes et les jeunes (20,4 % et 26,9 %, respectivement). Mais le taux de chômage pourrait grimper cette année, en raison de la cessation d'activité de plusieurs entreprises, notamment dans le secteur du BTPH. L'inflation augmenterait pour s'établir à 4% en 2020, prévoit la Banque mondiale. "La rupture des approvisionnements en provenance de Chine et d'Europe en raison de l'épidémie de Covid-19, qui représentent plus de 80 % des importations algériennes, pourrait entraîner des retards et faire grimper les prix des importations", explique-t-elle. "L'ampleur et la progression rapide des déficits budgétaire et courant exigent une action urgente, car la dette publique augmente, les réserves devraient s'épuiser en 2021 et des engagements hors bilan sont imminents", estime l'institution financière internationale. Selon cette dernière, la dette pourrait augmenter à 56,2% du PIB en 2020, puis à 67,1% du PIB en 2021, pour atteindre 75,7% du PIB en 2022. Des mesures de court terme Pour la Banque mondiale, "les mesures passées et présentes prises par les pouvoirs publics pour tenter de régler la question du double déficit, dont les restrictions des importations ou le financement monétaire, constituent des solutions à court terme qui devraient être complétées par des réformes visant à remédier aux faiblesses structurelles de l'économie". Elle estime que la dépréciation du taux de change pourrait apporter une nouvelle bouffée d'oxygène. "Le collectif budgétaire attendu pour 2020 devrait être aligné sur les priorités du gouvernement et s'attaquer à la crise actuelle", indique le rapport. Certes, le retard apporté au rééquilibrage des finances publiques augmente le risque d'un ajustement plus marqué par la suite, mais, souligne la Banque mondiale, des réductions importantes de l'investissement pourraient asphyxier la croissance hors hydrocarbures. Dans le même temps, relève le rapport, "les passifs éventuels de plus en plus importants des banques publiques ayant accordé des engagements à des entreprises publiques en difficulté ne feront que multiplier les risques budgétaires". Par ailleurs, les efforts visant à stimuler l'investissement privé, comme l'abrogation de la règle 51/49 pour les secteurs non stratégiques, seront entravés par des incertitudes nationales et mondiales. Quoi qu'il en soit, à moyen terme, souligne le rapport, "il sera essentiel d'améliorer sensiblement le climat des affaires pour promouvoir l'investissement privé, en encourageant la diversification tout en renforçant la résilience et en stimulant la croissance".