Figure populaire du théâtre algérien, Nouria n'était pas seulement actrice des planches et du cinéma. Elle avait joué un rôle concret dans la bataille d'Alger. C'est chez elle qu'ont cachait aussi des bombes. La défunte était proche de l'héroine de la Révolution, Djamila Bouhired. Elle s'en va ainsi la doyenne des planches et du 7e art après une vie consacrée à sa passion. Avec ses compagnons de route qu'étaient son époux Mustapha Kazderli, Ahmed Ayad ou encore Amar Maârrouf, elle a hissé au sommet le 4e art national. Elle est partie l'inégalable Khadija Benaïda dite Nouria (1921-2020), cette étoile du 4e art ! L'icône de l'ancien opéra Mahieddine-Bachtarzi a rejoint son époux Mustapha Bouhrir alias Mustapha Kazderli, mais aussi d'autres astres qui s'apprêtent à illuminer sa tombe de leurs esclaffes de rires et des non-dits de leurs bêtisiers sur les planches. Sur ce point, il doit y avoir du monde sur les quais de la vie de l'au-delà, à attendre l'enfant de Ammi Moussa (Relizane) qui donnait la réplique à Ahmed Ayad alias Rouiched (1921-1999) dans la mémorable pièce El-Bouaboune (1970) de Rouiched. Pour qui s'en souvient, Les Concierges est ce décor constellé d'étoiles du terroir que comptait le Théâtre national algérien depuis la glorieuse troupe artistique du FLN et jusqu'à l'époque bénie des seventies. En ce qui a trait au talent de Nouria, son art a éclaté au cours de l'acte où elle a incarné l'acariâtre Khalti Aïcha ou Aïchouche, qui était interpellée en ces termes par le duo de comédiens Amar Maârouf dit Âamimar (1942-2018) et Yahia Benmabrouk alias "l'apprenti" (1928-2004) : "Aïcha, Aïchouche ! Kech khobz yabes ? Nâatih leldjouadj ouel fakhd smine nahdihoulek lik" (Aïcha ! Y aurait-il du pain rassis ? Je l'échangerai chez le volailler contre un poulet, et la cuisse charnue sera pour toi). Toutefois, Nouria a été remplacée par la défunte Fatiha Berber qui incarna à son tour la ronchonne Aïcha lors de la reprise des Concierges dans les années 1990. À ce propos, le comédien Mustapha Ayad s'en souvient et narre la réussite de son challenge qu'il doit à Nouria sur les planches lors de la reprise de la même pièce : "Nouria était là à mes côtés lorsque j'ai eu à diriger les répétitions de la pièce El-Bouaboune en 1995 aux côtés des regrettés Keltoum, Sissani, Sid-Ali Kouiret... Elle n'a pas cessé de m'encourager face à des bêtes de scène." Et dans la haie d'honneur dressée dans l'au-delà pour Nouria, il y aura les retrouvailles avec son partenaire Ali Abdoune dans le film Eddi oula khelli (à prendre ou à laisser) de Djamel Bendedouche. Elle s'en va ainsi la doyenne des planches et du 7e art après avoir adressé l'ultime révérence à son public par le biais du feuilleton Samahni (pardonne-moi) de Sid-Ali Bensalem lors du dernier Ramadhan. Qu'elle repose en paix au Panthéon de l'art cette étoile qui manquera à la scène du croissant de Mustapha Badie et de Mustapha Kazderli.