Le président du Syndicat national des magistrats a pointé du doigt "la mentalité" de certains juges qui les a poussés à faire de la détention provisoire "une règle générale". Le président du Syndicat national des magistrats (SNM), Issaad Mabrouk, a sévèrement critiqué, dans un post publié vendredi sur sa page Facebook, la remise en cause, dans certaines affaires de justice, de l'égalité des justiciables devant la loi. En effet, le magistrat trouve "dommageable" que des prévenus ayant fait appel et leurs affaires renvoyées n'aient pas tous bénéficié de la libération, déplorant qu'un tel principe "ne soit pas appliqué à tous les justiciables". "C'est là une violation dangereuse qu'il faut pointer du doigt car cela remet en cause le principe de l'égalité de tous devant la loi. Et il devient scandaleux d'accélérer la programmation de certaines affaires, et de traîner la patte dans la programmation d'autres affaires en ajournant le verdict sans justification légale aucune", a-t-il pesté, non sans exprimer son accord quant à la décision de renvoi d'une affaire d'un prévenu ayant fait appel et ayant bénéficié d'une libération dans le but, a-t-il dit, de "permettre aux autres parties d'exercer leur droit de faire appel dans le même jugement". "Le référé, qui garantit l'intérêt d'un prévenu ayant fait appel et corrige l'erreur du juge de première instance avec le moins de dommages, est l'application de l'esprit de la loi", a-t-il fermement soutenu. Autre décision de justice critiquée par le président du SNM : le rejet de la demande de report de l'affaire de Karim Tabbou devant le tribunal d'Alger sans procéder à sa libération, en la qualifiant d'"erreur violant les règles d'un procès équitable". Se présentant comme étant de "ceux qui croient que la liberté des personnes est quelque chose de sacré et la détention préventive de tout prévenu reste une mesure très exceptionnelle", M. Issaad a pointé du doigt "la mentalité" de certains juges qui les a poussés à faire de cette détention provisoire "une règle générale" et, selon lui, "sans qu'il y ait interférence d'une quelconque partie". Les services du ministère de la Justice ont subi, eux aussi, les foudres du président du SNM qui leur a reproché leur absence dans le débat sur la légalité de la libération-éclair d'un prévenu alors qu'ils sont tenus d'"éclairer l'opinion publique sur la réalité des questions procédurales et judiciaires qui préoccupent l'opinion publique laissée en otage de points de vue étalés sur Facebook et qui souvent manquent d'objectivité". De l'avis de M. Issaad, l'arrestation du correspondant de France 24 et d'un agent de la Protection civile, et leur libération le lendemain sont "légales", voire "légitimes". "Accélérer la décision dans l'appel introduit par le correspondant de France 24 ou celui de l'agent de la Protection civile, si cela n'obéit pas à des pressions ou des ordres venus d'en haut, est légal et légitime", a-t-il soutenu. Pour appuyer son avis, il a cité les "délais" prévus par le code de procédure pénale qui "visent à protéger les intérêts des parties et leur droit à la défense". Selon lui, l'interprétation d'un texte pénal peut être extensible "si elle est dans l'intérêt de l'accusé". "Dans ce cas de figure, la libération d'un accusé contestant la décision de son incarcération le lendemain de son appel est judicieuse du point de vue juridique puisqu'il a permis de réaliser un intérêt supérieur. L'on ne peut invoquer le délai légal de 48 heures pour garantir son droit de préparer sa défense, sachant que le juge est l'avocat de tous et qu'il est de son devoir de protéger les droits de chacun", a-t-il précisé.