La Constitution algérienne édicte la même règle à l'article 45 ainsi conçu : « Toute personne est présumée innocente jusqu'à l'établissement de sa culpabilité par une juridiction régulière et avec toutes les garanties exigées par la loi. » Enfin, le droit à la défense doit être garanti. Le Protocole international le dit avec insistance à l'article 14/3-d. : « Toute personne accusée d'une infraction pénale a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties minimales : d. A être présente au procès et à se défendre elle-même ou à avoir l'assistance d'un défenseur de son choix ; si elle n'a pas de défenseur, à être informée de son droit d'en avoir un, et, chaque fois que l'intérêt de la justice l'exige, à se voir attribuer d'office un défenseur, sans frais, si elle n'a pas les moyens de le rémunérer. » La même garantie est reprise à l'article 7/1-c. de la Charte africaine qui dit : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix. » La Charte arabe insiste également sur le droit à la défense à l'article 16/4 : « Toute personne accusée d'une infraction... a droit au cours de l'instruction et durant le procès aux garanties minimales suivantes : 4/ Droit de bénéficier gratuitement de l'assistance d'un avocat pour la défendre si elle ne peut pas le faire elle-même ou si l'intérêt de la justice l'exige... » Pour sa part, la Constitution algérienne affirme à l'article 151 : « Le droit à la défense est reconnu, en matière pénale, il est garanti. » B - L'indépendance et l'impartialité du juge Elles sont autant de garanties pour la conduite du procès de façon équitable. Très proches, ces deux principes ne se confondent pas : l'indépendance s'exprime d'un point de vue externe, par rapport à d'autres pouvoirs que le pouvoir judiciaire, celui de l'exécutif et celui du législatif. Cela concerne aussi tout pouvoir de fait (les médias ou les interventions suscitées par les uns et les autres). D'ailleurs, l'article 138 de la Constitution affirme que « le pouvoir judiciaire est indépendant et qu'il s'exerce dans le cadre de la loi ». Quant à l'impartialité, elle est liée beaucoup plus à l'organisation et au fonctionnement interne des juridictions. I - L'indépendance du juge est formellement reconnue par la loi fondamentale. L'article 147 de la Constitution souligne que « le juge n'obéit qu'à la loi ». Cela est encore renforcé par l'article 147 de la Constitution qui dispose : « Le juge est protégé contre toute forme de pressions, interventions ou manœuvres de nature à nuire à l'accomplissement de sa mission ou au respect de son libre arbitre. » Il est indispensable que le juge puisse exercer sa mission en toute liberté, sans entraves. Il ne doit obéissance qu'à sa propre conscience, comme cela lui est recommandé par le serment qu'il doit prêter. L'indépendance doit être assurée à l'égard du pouvoir législatif qui ne peut remettre en cause, ni les données d'un procès ni les décisions rendues. Ceci, parce que comme le dit l'article 140/1 de la Constitution : « La justice est fondée sur les principes de légalité et d'égalité. » Et l'article 147 ajoute qu'elle « est rendue au nom du peuple ». L'exigence d'indépendance du juge doit être également assurée à l'égard du pouvoir exécutif. Cela dépend de la protection du juge mise en place pour que l'exécutif n'intervienne pas dans les affaires judiciaires, via la carrière des hommes qui rendent la justice. C'est pourquoi le magistrat n'est responsable que devant le Conseil supérieur de la magistrature et dans les formes prescrites par la loi, de la manière dont il doit s'acquitter de sa mission. (Article 149 de la Constitution). Dans le système juridique algérien, la protection du magistrat est assurée par une série de dispositions, notamment du code pénal, qui incriminent les comportements mettant en cause la crédibilité de l'autorité de la justice. 2- L'impartialité du juge Les magistrats doivent satisfaire à l'obligation d'impartialité, édictée par les conventions internationales ou la loi constitutionnelle. La doctrine a été conduite à proposer de distinguer l'impartialité fonctionnelle de l'impartialité personnelle. Dans le premier cas, la question de l'impartialité du juge se pose, en raison de l'exercice même de ses fonctions, indépendamment de ses convictions personnelles. Dans le second cas, l'impartialité du juge peut se heurter à ses préjugés. Il faut donc protéger le justiciable contre ces préjugés. Seule une éthique forte du juge peut garantir complètement le justiciable contre les préjugés de son juge, et cela au-delà de toutes les techniques procédurales, au sujet de la neutralité du juge. L'impartialité du juge serait mise en échec lorsqu'un magistrat connaît d'une même affaire en première instance et en appel, cela se pose lorsque le juge connaît des mêmes faits, entre les mêmes parties, à des instances différentes. Il en est de même en matière de cassation avec renvoi ; il peut advenir que le juge, qui a connu de l'affaire ayant fait l'objet d'une cassation, se retrouve dans la juridiction de renvoi. Enfin, l'impartialité du juge est mise en cause lorsque ce dernier ne tient pas compte des reproches pour lesquels il peut être récusé. II. Les garanties d'ordre procédural Le droit à un procès équitable doit offrir trois garanties procédurales qui tiennent à la célérité de la procédure, à la publicité des débats et surtout à l'équité. A - La célérité de la procédure Il est recommandé que la durée des procédures, tant en matière civile qu'en matière pénale, doit s'inscrire dans un délai raisonnable. L'article 14/3 du Pacte international recommande que « toute personne accusée d'une infraction pénale a droit, en pleine égalité, c. A être jugée sans retard excessif ». Cela est repris par la Charte africaine à l'article 7-d. dans lequel il est dit : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend le droit d'être jugé dans un délai raisonnable par une juridiction impartiale. » La Charte arabe n'a pas manqué d'affirmer la même exigence à l'article 14/5 qui s'exprime ainsi : « La personne arrêtée ou détenue du chef d'une accusation pénale est présentée dans les plus brefs délais à un juge ou à un fonctionnaire habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et devrait être jugée dans un délai raisonnable ou libérée. » Il faut remarquer que cette exigence s'impose beaucoup plus en matière pénale. Cette préoccupation en est d'autant plus forte et justifiée dans les affaires pénales, car en plus de l'intérêt qui s'attache à une bonne administration de la justice, il faut souligner que la justice pénale met en cause l'honneur et la dignité de la personne, et, en cas de détention, sa liberté, sans compter sa situation familiale. Le code de procédure pénale a, d'ailleurs, enfermé l'accomplissement de divers actes de procédure dans des délais stricts et dont le respect aide à la célérité de la procédure. Bien sûr, le caractère raisonnable de la durée de la procédure s'apprécie suivant les faits de la cause et la complexité de l'affaire. Par ailleurs, la nature de l'affaire peut susciter une appréciation de la durée de la procédure. D'une manière générale, la complexité de l'affaire va s' apprécier par rapport à ses éléments de fait et de droit, et la célérité de la procédure sera fonction de ces éléments, sans toutefois verser dans la lenteur. Cependant, la pratique du délai non raisonnable peut être assimilée à une faute du service de la justice. B - L'équité en matière procédurale Le concept de l'équité dans la solution d'un procès est fortement recommandé par les instruments internationaux, et aussi par la loi nationale. Le Protocole international s'est exprimé dans ce sens à l'article 14/1 qui dit : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement... par un tribunal compétent. » Cela est souligné par la Charte arabe ainsi : « Toute personne a droit à un procès équitable dans lequel sont assurées des garanties suffisantes et conduit par un tribunal indépendant et impartial établi préalablement par la loi qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ou se prononcera sur ses droits et obligations. » (Article 13/1).La Constitution s'est conformée à l'exigence de l'équité dans la solution du procès, puisqu'il est dit à l'article 139 : « Le pouvoir judiciaire garantit, à tous et à chacun, la sauvegarde de leurs droits fondamentaux. » Il est ajouté à l'article 140 : « La justice est fondée sur les principes de légalité et d'égalité. » L'idée d'égalité est mise ici en avant. Les applications du droit à un procès équitable sont multiples et ceci compte tenu des intérêts en jeu, plus importants, en matière civile qu'en matière pénale. Le concept de l'équité dans la solution du litige doit s'appuyer en toute matière, sur la motivation des décisions de justice, et le principe de la contradiction. 1- La motivation des décisions de justice Elle est indispensable à la qualité de la justice et elle constitue un rempart à l'arbitraire. En obligeant le juge à se déterminer en toute conscience et conviction. Pour le justiciable, la motivation des décisions de justice lui offre une justification de la décision et lui permet d'en contrôler le bien-fondé. Enfin, elle permet à la juridiction suprême d'exercer son contrôle. La Constitution exige que les décisions de justice soient motivées (article 144). C'est pourquoi il faut éviter toutes les mesures, même bien intentionnées, qui tendent à décharger le juge de l'obligation de motiver ses décisions, au motif bien spécieux qui est celui d'accélérer le cours de la justice. Ainsi, par exemple, la seule référence dans les motifs que le premier juge a bien statué ou encore la référence aux conclusions des parties constitue un défaut de motifs et confine à la paresse. En matière civile, l'obligation de motiver est très générale, parce qu'elle s'impose à toutes les juridictions civiles et à tous les jugements et même aux sentences arbitrales, dans la mesure de ce qu'imposent la nature du litige et les missions confiées aux arbitres. La Cour suprême opère une distinction entre le pouvoir du juge qui exige une motivation qu'elle tient à contrôler et le pouvoir discrétionnaire qui lui est traditionnellement accordé. En matière pénale, il faut remarquer que la motivation ne s'impose pas aux décisions des tribunaux criminels, le jury devant répondre par oui ou par non aux questions posées, sans aucune explication quant à la décision de condamnation ou d'acquittement. A notre point de vue, cette méthode prétorienne n'est pas satisfaisante, car la motivation est la garantie contre l'arbitraire et parce que tout un chacun doit connaître la raison de sa condamnation. 2 - Le principe du contradictoire L'égalité devant la justice est essentiellement envisagée sous l'angle du droit à une procédure contradictoire Le principe est affirmé d'emblée par le Pacte international à l'article 14/1 qui précise que « toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent ». Quant à la Charte africaine, elle ne semble pas avoir accordé une importance à la question. Pour sa part, la Charte arabe y a insisté en s'exprimant à l'article 16/5 ainsi : « Toute personne accusée d'une infraction a droit au cours de l'instruction et durant le procès aux garanties minimales suivantes : 5/ Droit d'interroger elle-même ou de faire interroger par son défenseur les témoins à charge et d'obtenir la comparution de témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge ». La garantie d'un procès équitable implique « l'obligation d'offrir à chaque partie, la possibilité de présenter sa cause, y compris ses preuves dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ». Le principe du contradictoire concerne toutes les procédures. Quant aux personnes concernées, il s'agit des parties, demandeur et défendeur, et intervenants volontaires ou forcés. Quelle est la portée du principe de la contradiction ? C'est d'abord le pouvoir de discuter de tout ce qu'avance, en fait et en droit, l'adversaire et de tout ce qu'il produit comme argumentation : pièces ou documents. C'est ensuite de pouvoir discuter avec le juge. En principe, les exigences découlant du contradictoire sont les mêmes au civil comme au pénal. Mais, dans ce dernier cas, des problèmes peuvent se poser, relativement, aux réquisitions du ministère public. En effet, il n'est pas d'usage que le ministère public communique ses réquisitions avant de les soutenir à l'audience. En outre, au sujet de la production de pièces nouvelles à l'audience par le ministère public, il serait utile de respecter le droit des parties de les examiner et de les discuter, soit qu'il soit nécessaire que le président de la juridiction intervienne dans ce sens. Ce sont là des situations à prendre en considération dans une éventuelle évolution du principe du contradictoire ; ce qui peut consolider l'Etat de droit. c - La publicité des débats C'est une exigence qui est nécessaire à la vie de la démocratie, en ce qu'elle se rapporte à une justice transparente. L'affirmation du principe est établie au plan international et au plan interne. Dans les instruments internationaux, l'article 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme édicte : « Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation, en matière pénale dirigée contre elle. » Le même principe est consacré par l'article 14/1 du Pacte international qui dit : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue, équitablement et publiquement par un tribunal compétent et impartial, établi par la loi, qui décidera du bien-fondé de cette accusation, en matière pénale dirigée contre elle, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil. » Il y est encore dit : « Cependant, tout jugement rendu, en matière pénale ou civile, sera public, sauf si l'intérêt des mineurs exige qu'il en soit autrement ou si le procès porte sur des différentds matrimoniaux ou sur la tutelle des enfants. » Quant à la Charte africaine, elle s'est contentée de dire : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue. » La Charte arabe a consacré la publicité de la procédure en disposant l'article 13/2 : « Le procès est public, sauf des cas exceptionnels, lorsque l'exige l'intérêt de la justice, dans une société respectueuse des droits de l'homme. » Au plan interne, la Constitution algérienne précise à l'article 144 : « Les décisions de justice sont motivées et prononcées en audience publique. » Néanmoins, les dispositions tant du code de procédure civile que celles du code de procédure pénale insistent sur le fait que les audiences soient publiques, sauf exceptions, et que les jugements soient rendus en audience publique.