L'obtention du vote de confiance en faveur du cabinet que va présenter le chef du gouvernement désigné exige une majorité absolue des voix (109 sur un total de 217 députés). Le nouveau gouvernement de Hichem Mechichi en Tunisie, annoncé le 24 août, passera demain son examen d'approbation au Palais du Bardo à Tunis, où siègent les élus du peuple et où 217 députés se prononceront, lors d'une séance de vote en plénière, pour ou contre l'équipe gouvernementale, un cabinet taillé sur mesure pour le président Kaïs Saied, selon certains observateurs. Composé exclusivement d'administrateurs et d'universitaires, inconnus du grand public, le gouvernement Mechichi, le deuxième en Tunisie en à peine six mois, a été mis sur pied pour affronter les défis urgents liés notamment à la situation économique fragile et de plus en plus menaçante. Si la majorité de la classe politique n'a pas ouvertement rejeté la liste de Mechichi, il n'en demeure pas moins que son caractère apolitique soulève une gêne, voire une "désapprobation", bien qu'elle soit de forme, chez les ténors de la politique en Tunisie. C'est le cas entre autres d'Ennahdha, qui tient aujourd'hui même une réunion de son conseil consultatif (echoura) pour décider de la marche à suivre. Parti majoritaire à l'ARP, avec 54 députés, le mouvement islamiste s'est jusque-là employé à critiquer l'option de Hichem Mechichi pour un gouvernement de compétences indépendantes. Les dirigeants du parti de Rached Ghannouchi se sont succédé aux micros des médias tunisiens cette semaine pour exprimer leur mécontentement en raison des choix de Mechichi, chargé par le président de former un gouvernement de technocrates, en veillant à écarter de sa liste tous les partis politiques. Durant le week-end dernier, Ghannouchi a souligné que, "dans l'absolu, Ennahdha est contre la formation d'un gouvernement de compétences, étant donné que cela dénature la démocratie, les résultats des élections et la volonté des électeurs". Prélude pour un vote contre à l'Assemblée ? Pas si sûr. Les députés de Ghannouchi le savent. Un rejet écrasant du gouvernement Mechichi demain par les députés provoquerait aussitôt la dissolution de l'ARP et mènerait le pays à de nouvelles élections législatives anticipées. Le piège d'un scénario que la majorité des formations politiques éviterait volontiers. Aussi, avec un poids relatif dans un Parlement émietté, Ennahdha n'a pas tout à fait les coudées franches pour convaincre ses partenaires dans la coalition qui regroupe 120 élus et parvenir par conséquent à une position commune. Il se trouve que Qalb Tounès, deuxième formation au Parlement (27 députés) et qui fait partie de la coalition d'Ennahdha, s'est déjà exprimé en faveur d'un vote pour le gouvernement Mechichi, même en émettant quelques réserves sur certains portefeuilles ministériels. Hormis la position tranchée du Courant démocrate (22 députés) et d'Al-Karama (19 députés) s'exprimant pour un rejet, la plupart des partis devront voter demain la confiance au gouvernement de Mechichi. Karim Benamar