À l'abandon depuis 1957, le village manque de tout : pistes impraticables, absence de réseaux d'eau potable et d'assainissement, des zones pas encore électrifiées... Ighzer Iwaqouren, un village de montagne perché à quelques centaines de mètres d'altitude sur le flanc sud du Djurdjura, à moins de dix kilomètres à l'est de la commune de Saharidj (50 km au nord-est de Bouira), fait l'objet d'une réhabilitation. Le collectif de jeunes d'Iwaqouren, Agraw Tigemmi n'Iwaqouren, a décidé de redonner vie à ce village de montagne incendié et ses habitants déportés par l'armée coloniale française le 6 mai 1957. L'idée est née, selon Mhend Mensous, membre du collectif, par le souci porté par les villageois à leur patrimoine. "L'idée est venue aussi du fait que nous avons constaté que des villageois ont déjà commencé à restaurer leurs maisons tout en gardant le cachet ancestral, en utilisant des matériaux locaux, notamment la pierre. Nous insistons sur cet aspect", ajoute Mhend. Pour réussir ce projet, le collectif de jeunes a opté pour le volontariat. Les deux derniers vendredis 4 et 11 septembre, les villageois ont effectué une opération de nettoyage et des travaux d'égalisation du sol à l'aide de tout-venant. Le projet consiste, selon la fiche technique élaborée par le collectif, à aménager les ruelles principales du village. La première est celle qui relie la place Laïnsar (façade postérieure d'Ahanou) à la passerelle dite Tiqentart n'Chemmou, sur une longueur de 230 m. Pour ce qui est de la deuxième ruelle, elle traverse Msalah sur une longueur de 150 m. Ainsi, l'empièrrement des ruelles sera fait par la pierre d'ardoise, tout en réalisant dans chacune d'elles une rigole de 20 cm de largeur bordée de blocs rectangulaires de pierres, qui évacuera les eaux de ruissellement. Le membre d'Agraw Igemmi n'Iwaqouren souligne que ce projet prendra également en considération plusieurs aspects, notamment l'aspect architectural (habitations), l'aménagement des ruelles et places publiques, le réseau d'eau potable et celui des eaux usées, l'électrification, le recyclage des déchets, le tourisme, etc. Les habitants du village Iwaqouren, dont Ighzer et Tadart Ledjdid, ont été déportés le 6 mai et le 4 novembre 1957 par l'armée coloniale et installés dans un camp de toiles qui est devenu l'actuel Raffour. Ces deux villages d'Iwaqouren ont donné 113 martyrs à la révolution. Depuis 1957, le village est à l'abandon. Les habitants n'y sont pas retournés par défaut de commodités. Le village manque de tout, les pistes sont impraticables, les ruelles dégradées, les réseaux d'eau potable et d'assainissement absents, et certaines zones du village ne sont pas encore électrifiées. "Du fait de plusieurs facteurs socioéconomiques et sécuritaires, le patrimoine rural d'Iwaqouren ne cesse de se perdre, en dépit de quelques actions fragmentaires, entreprises soit par le comité du village, soit individuellement par les citoyens ou par des collectifs de jeunes, soucieux de la sauvegarde et de la promotion du patrimoine qui leur a été légué par leurs ancêtres", lit-on dans le document. Mhend Mensous a affirmé que ce projet de réhabilitation des ruelles n'est qu'une première étape. Il y a deux ans, un projet sur la toponymie au village Iwaqouren a été réalisé. Les villageois ont installé des panneaux toponymiques en bois portant les noms des lieux d'Ighzer Iwaqouren en tamazight. Le collectif mise beaucoup sur les actions de volontariat et la contribution inestimable des habitants de Raffour d'ici et ceux établis à l'étranger, que ce soit pour l'achat des matériaux ou les travaux. Un geste qui permet au village, haut lieu de l'histoire, de renaître de ses cendres et de perpétuer un mode de vie ancestral.