Après l'avoir totalement exclu, les pouvoirs publics envisagent de recourir à l'endettement extérieur auprès de certaines institutions financières multilatérales. C'est du moins ce que laisse entendre le communiqué du Conseil des ministres qui s'est tenu dimanche. Le document évoque la présentation par le ministre des Finances de trois décrets présidentiels. Le premier concerne les cotisations de l'Algérie à la septième augmentation générale du capital de la Banque africaine de développement (BAD). Le second porte sur les augmentations sélectives et générales du capital de la Société financière internationale (SFI) relevant de la Banque mondiale (BM), en charge du secteur privé, pour l'exercice 2018. Le troisième projet du décret présidentiel est inhérent à une demande de souscription à la 19e reconstitution des ressources de l'Association internationale de développement (IDA), l'une des filiales de la BM, dédiée aux pays les plus pauvres. À l'issue de l'approbation des trois textes, le président de la République a ordonné au gouvernement " d'œuvrer à tirer profit de ces institutions financières en proportion de notre contribution à celles-ci, comme le font d'autres pays, et ce, en obtenant notre part de postes dans leurs organes et en bénéficiant de leurs moyens en matière de financement au profit de l'Algérie". En mai dernier, le président de la République avait affirmé que l'Etat ne recourra ni à l'endettement extérieur ni à la planche à billets pour ses besoins financiers face à la chute des prix du pétrole, mais plutôt à l'emprunt auprès des citoyens. "Nous n'irons ni au Fonds monétaire international ni à la Banque mondiale car l'endettement porte atteinte à la souveraineté nationale, une expérience que nous avons vécue au début des années 1990", avait-il tranché. Quelques mois auparavant, le Premier ministre avait indiqué devant les journalistes en marge de l'adoption du plan d'action que les institutions telles que la BAD et les Fonds arabes d'investissement octroient "des prêts à très longs termes et avec des taux d'intérêts très faibles, qui ne touchent pas à notre souveraineté et ne remettent pas en cause les fondements de notre politique économique". L'effondrement des prix du pétrole et la crise sanitaire ont exacerbé la situation budgétaire et extérieure déjà fragiles de l'Algérie. Le recours à la planche à billets a considérablement augmenté l'endettement interne depuis 2017. Selon la Banque mondiale, plus de 70% de la dette publique sont dus à la Banque centrale au titre des opérations de financement monétaire effectuées entre 2017 et 2019. La dette publique a augmenté en flèche, dépassant 45,8% du PIB, contre 37% en 2018. Plusieurs analystes estiment que le retour à l'endettement extérieur est inévitable, en raison du niveau du déficit budgétaire et de la contraction rapide des réserves de change. Après le dernier décaissement du FMI en faveur de l'Algérie en 1999, l'Algérie n'a pas recouru à l'emprunt extérieur avant 2016, lorsque la BAD lui a fourni un prêt d'appui budgétaire de 900 millions d'euros. Pour rappel, la BAD et l'Algérie ont signé, le 23 novembre 2016 à Abidjan, un accord de prêt de 900 millions d'euros pour appuyer la compétitivité industrielle et énergétique du pays. Ce prêt, sous forme d'appui budgétaire, fournit au gouvernement les ressources nécessaires pour pallier la baisse de ses recettes, conséquence de la chute drastique des cours du pétrole. "Ce programme d'envergure, parmi les plus importants consentis par la BAD, intervient une douzaine d'années après le dernier emprunt que l'Algérie avait contracté auprès de la Banque", avait indiqué cette institution financière.