"À l'Eniem, à Electro-Industries (ex-Enel) comme à l'Enie de Sidi Bel-Abbès, certains produits peuvent arriver à 80% d'intégration, et nous allons essayer d'en faire les pilotes de la politique d'intégration", a promis le ministre. Après la visite effectuée, avant-hier, mardi, par le ministre de l'Industrie, Ferhat Aït Ali Braham, dans la wilaya de Tizi Ouzou, l'espoir de voir les deux fleurons de l'industrie locale, à savoir l'Eniem et l'Electro-Industries d'Azazga, sortir de leur agonie et se remettre sur pied est désormais permis, mais non sans condition. Le ministre, qui a visité les deux complexes où il s'est entretenu avec leurs responsables, a même annoncé qu'il compte en faire désormais les pilotes de la politique d'intégration prônée par le gouvernement. "J'ai vu leurs capacités d'intégration, et j'ai vu qu'à l'Eniem, à l'ex-Enel comme à l'Enie de Sidi Bel-Abbès, certains produits peuvent arriver à 80% d'intégration, et nous allons essayer d'en faire les pilotes de la politique d'intégration", a-t-il déclaré après avoir affirmé que l'Etat comptait apporter son soutien à toutes les entreprises, publiques et privées, qui s'inscrivent dans cette nouvelle politique. Néanmoins, le ministre a expliqué que cela ne peut se concrétiser que sous condition. Autrement, ces entreprises sont appelées, a-t-il signifié, à fournir de considérables efforts en terme de restructuration interne. "Nous, nous avons œuvré à limiter la concurrence déloyale, mais il reste à ces entreprises de faire une restructuration interne, une révision de leurs modes de gestion et même de leurs relations de travail avec les partenaires sociaux", a-t-il déclaré, non sans brosser un tableau peu reluisant de la situation actuelle des deux plus importants complexes industriels que compte la wilaya de Tizi Ouzou. "Les deux projets totalisent 70 ha, avec 20 ha de bâti, pour un chiffre d'affaires d'environ 8 milliards de dinars. Un chiffre d'affaires qui avoisine celui d'un grossiste importateur. Les chiffres d'affaires de ces complexes sont très faibles par rapport à leurs actifs", a-t-il déploré lors de la conférence de presse animée à l'issue de sa visite. Au complexe Eniem, à Oued Aïssi, où il s'est rendu dans la matinée, le ministre a expliqué que cette entreprise publique est loin de la rentabilité attendue par hectare. "Cette unité est implantée sur 42 hectares. Dans certains pays, les hectares industriels sont calculés en chiffre d'affaires produits en valeur ajoutée produite, mais 4 milliards de dinars pour 42 hectares, cela fait 100 000 DA par hectare, et là, ce n'est pas une productivité", a-t-il asséné. Et au ministre de préciser qu'il n'est pas venu faire seulement des reproches, mais aussi porter la promesse des pouvoirs publics de relancer toutes les industries qui ont été initiées dans le passé et qui ont été quelque part parasitées, ces dernières décennies, par une concurrence déloyale. "Je viens de voir vos projections et vos données, et je constate que le chiffre d'affaires est modeste par rapport aux surfaces que vous occupez et aux prétentions que nous avions dans les années où nous avons lancé ce genre d'industrie", a lancé M. Aït Ali, en s'adressant au P-DG d'Electro-industries d'Azazga, à qui il a fait remarquer une certaine "dispersion" dans les activités de cette entreprise avant de lui recommander de cibler, dans l'immédiat, le segment le plus porteur et où il y a la meilleure valeur ajoutée et le besoin le plus urgent en matière de motorisation. "Il va falloir mettre le paquet sur la gamme qui marche le mieux puisqu'il y a un souci de rentabilité financière et économique de l'entreprise. Normalement vous pouvez doubler votre chiffre d'affaires rapidement après la sortie de la crise actuelle. Vous avez une trésorerie excédentaire, mais il faudrait voir plus grand. Il ne s'agit pas d'être content de flotter. Il faut vous projeter dans un avenir qui est autre que ce présent", a encore recommandé le ministre qui a conclu, après avoir écouté les exposés présentés par les responsables de ces deux complexes, que toutes les deux ont des difficultés immédiates, mais aussi un potentiel de redressement. "Les entreprises publiques n'étaient pas dans le CKD durant les années 70, 80 ou 90. Quand on a ouvert la voie à l'importation directe de composants et même de kits, forcément vous aussi avez suivi, car vous n'aviez pas le choix. Par le passé, on a favorisé une forme de concurrence que le secteur public ne pouvait pas affronter. Maintenant, on a commencé par changer le paradigme en matière d'industrie électroménagère. Celui qui veut faire une vraie industrie, il a des avantages, et celui qui veut importer, il a des droits de douane à payer. L'ère de la fausse industrie est révolue. Aujourd'hui, le gouvernement a, pour le secteur public et le secteur privé national, pris une autre voie, celle de l'intégration, et là, il va falloir que ça décolle !", a-t-il martelé tout en mettant également l'accent sur la qualité des partenariats dans lesquels ces entreprises peuvent s'engager à l'avenir. "À l'avenir, il faudrait que les partenariats soient gagnant-gagnant. Celui qui ramène un savoir-faire doit être quantifié, estimé et facturé pour savoir ce qu'il ramène exactement. Ce n'est pas un savoir-faire empirique qu'on n'estime pas au départ, et qu'on découvre 10 ans après que c'était juste un savoir-faire dans la ponction des réserves de changes algériennes. Ce qui est valable pour l'Eniem est valable pour tout le secteur industriel public et aussi le secteur privé", a-t-il soutenu. Concernant d'éventuels nouveaux investissements dans la wilaya de Tizi Ouzou, le ministre a expliqué qu'en raison du problème du foncier industriel que connaît la région, son département mise plus sur le développement de la PME et des start-up, que sur les grandes unités dans la région. "On ne peut pas faire de projets gigantesques dans cette région où le plus gros des terrains de l'Etat a déjà été utilisé pour les anciens grands complexes publics. Le gros des terrains est privé, en plus, souvent accidenté. Il y a des potentialités industrielles, mais ce sera beaucoup plus pour la PME/PMI et surtout la PME. Mais les plus gros projets futurs, le foncier ne le permet pas, mais on peut relancer ou recycler ce qui existe déjà", a-t-il affirmé, ajoutant que "les grands projets ne sont pas interdits à cette wilaya, mais il y a d'autres wilayas qui offrent des possibilités en termes de foncier industriel et de proximité avec les sources d'énergie qui sont autrement plus importantes que cette wilaya". Samir LESLOUS