Les contraintes sur le niveau de liquidité des banques s'aggravent à mesure que perdurent la crise sanitaire et ses effets néfastes sur l'activité économique et les prix du pétrole, dont dépendent étroitement l'économie nationale et la trésorerie de l'Etat. Dotée tout récemment d'un gouverneur officiellement nommé par le président de la République, après plusieurs mois de vacance de ce poste, la Banque d'Algérie (BA) vient en effet d'annoncer des mesures d'allègement monétaire allant jusqu'à soulager les banques et les établissements financiers de l'obligation de constituer un coussin de sécurité, comme l'exigent en principe les règles bancaires prudentielles en vigueur. En effet, dans un communiqué officiel, rendu public à la fin de la semaine dernière, la BA annonce, entre autres mesures visant à atténuer l'impact de la pandémie de Covid-19 sur le secteur économique, des mesures d'assouplissement monétaires ciblant le secteur financier et prévoyant de "réduire le seuil minimum du coefficient de liquidité", mais aussi et surtout de "dispenser les banques et les établissements financiers de l'obligation de constitution d'un coussin de sécurité". Les mesures exceptionnelles d'allègement de certaines dispositions prudentielles applicables aux banques et aux établissements financiers sont ainsi "reconduites jusqu'au 31 décembre prochain", précise sommairement le communiqué de la Banque centrale. En termes plus clairs, certaines banques de la place, confrontées à des contraintes de plus en plus pesantes quant à l'état de leur liquidité, se voient désormais dispensées de constituer des réserves obligatoires auprès de la Banque d'Algérie. Au-delà du contexte de crise sanitaire mondiale et de son impact conjoncturel sur l'économie et le commerce, de telles mesures d'exception rendent surtout compte des risques de sous-capitalisation et de vulnérabilité accrue qui pèsent sur le système financier domestique et sur son niveau de liquidité. En effet, après avoir abaissé, il y a à peine un mois, ses taux de réserves obligatoires, pour la troisième fois consécutive en moins d'une année, la Banque centrale autorise officiellement les banques primaires à contourner leur obligation de détenir à son niveau des fonds en comptes en guise de coussin de sécurité, comme le prévoit la réglementation bancaire en vigueur. Par ces mesures exceptionnelles, la banque des banques tente ainsi de faire valoir son rôle d'autorité monétaire pour amortir, un tant soit, peu la crise de liquidité qui pèse de plus en plus sur la solvabilité du système financier domestique. Une crise, certes, aggravée par les effets ravageurs de la crise sanitaire, mais qui tient surtout ses origines du tassement général de l'économie nationale à la suite de la chute brutale et durable des revenus pétroliers du pays. "À la fin de la pandémie, beaucoup de banques seront en grande difficulté car beaucoup de prêts ne seront pas remboursés, en particulier ceux des oligarques en prison", nous explique, en ce sens, l'expert international en finances, Nour Meddahi, qui anticipe, à terme, "une nécessaire intervention de l'Etat pour un plan de sauvetage".