Il n'y aura ni manifestations ni appels au boycott des produits français. Contrairement à certaines capitales de pays musulmans, Alger s'est montrée "mesurée" dans sa première réaction aux propos du président français, Emmanuel Macron, sur la liberté de caricaturer le prophète Mohammed. Celle-ci n'émane pas du gouvernement, ni du ministère des Affaires étrangères, mais du Haut conseil islamique, organisme rattaché à la présidence de la République. Le HCI "condamne énergiquement cette campagne virulente contre la meilleure et la plus noble des créatures, le prophète Mohammed (QSSSL), symbole de la tolérance et de la coexistence, mais aussi contre l'islam, religion de paix épousée par des centaines de millions de personnes aux quatre coins du monde", a affirmé, lundi, en fin de journée, le Haut conseil islamique. Cet organisme se dit "surpris" et dénonce l'"émergence d'une catégorie qui dévie des valeurs humaines", et "(...) qui prétend s'exprimer au nom de la liberté d'expression en portant atteinte à l'islam et à son prophète et en parodiant les symboles religieux dont le respect et l'intangibilité sont pourtant consacrés par les lois internationales". Dans une allusion au président Macron, qu'il ne cite pas au demeurant, passage non repris par l'agence officielle, le HCI considère ces attaques comme "une atteinte à toute l'humanité", notamment "quand elles émanent d'un responsable qui se considère comme le garant des valeurs de fraternité, de liberté et d'égalité". Lors de l'hommage rendu mercredi dernier au professeur Samuel Paty, dont la décapitation a provoqué une onde de choc au sein de larges pans de l'opinion, Emmanuel Macron a réitéré que "la France continuera de défendre les caricatures de Mahomet". Une position qui a suscité un flot de critiques. Histoire probablement de jouer la carte de l'apaisement, le HCI a appelé "l'ensemble des musulmans, les sages à travers le monde, les organisations à caractère religieux et les instances en charge des droits de l'Homme et du dialogue interreligieux à contrer ce discours radical et inhumain" et à "faire prévaloir la raison qui prône le respect des symboles religieux communs et le bannissement de la haine et du racisme". Il faut dire que si cette réaction tient beaucoup plus à des considérations internes, après la montée au créneau des courants islamistes, il reste que la proposition de boycott des produits français, lancée par un dirigeant islamiste, n'a pas eu l'effet escompté. Elle divise même les Algériens, comme on a pu le voir à travers certains commentaires sarcastiques et de dérision sur les réseaux sociaux.