Le procès en appel de Mahieddine Tahkout et des autres inculpés dans l'affaire a pris fin jeudi à la cour d'Alger. Après les plaidoiries de la défense qui ont duré plus de trois jours, le juge a décidé de mettre le verdict en délibéré pour le 18 novembre prochain. Durant la même journée, c'est la défense de Mahieddine Tahkout qui a tenté d'anéantir les arguments avancés par le parquet pour prouver l'innocence de son mandant. Principal accusé dans l'affaire, Mahieddine Tahkout a écopé, pour rappel, de 16 ans de réclusion en première instance. Pour sa défense, composée d'une dizaine d'avocats, l'affaire "est préfabriquée". "L'enquête qui a abouti à l'inculpation de Mahieddine Tahkout a été menée sur la base d'une lettre anonyme sur laquelle s'est appuyé un ancien responsable d'un service de sécurité", a dit Me Amine Sidhoum, dans une allusion à l'ex-patron de la gendarmerie, Ghali Belkecir, dont le nom a été cité par plusieurs avocats. La défense de Tahkout a également pris pour cible l'ancien ministre de l'Industrie, Youcef Yousfi, incarcéré dans le cadre de la même affaire. Me Mohamed Aggouni a estimé dans sa plaidoirie que Yousfi "est l'instigateur de la directive 344-17", estimant que Youcef Yousfi a oublié que "des concessionnaires sont régis par le décret 2074 et l'article 58 de la loi de finances 2014", qui obligeait "les concessionnaires à investir dans le créneau au bout de trois ans d'activité". "C'est ce qu'a fait Tahkout manufacturing compagny (TMC)", a ajouté l'avocat, considérant que la directive de Yousfi "ne s'appliquait pas à TMC", car "il a bénéficié d'une décision finale d'acceptation de son dossier par le CNI le 22 décembre 2016". "Yousfi était loin de son sujet", a ajouté l'avocat, précisant que "le directeur général des mines a considéré la directive de Yousfi comme un obstacle au développement de l'industrie automobile". "Le même DG des mines a demandé la révision de certains points contenus dans la directive", a informé l'avocat. Abordant le volet de la fraude fiscale, l'un des griefs retenus contre Mahieddine Tahkout, Me Aggouni a expliqué qu'en vertu "des modifications apportées dans la loi de finances 2012, notamment à l'article 144 bis du code de procédure pénale", cette affaire "n'a pas lieu d'être" car "aucune preuve n'est apportée pour étayer les accusations". L'avocat a estimé que "l'Algérie a besoin d'une réconciliation entre ses textes, ses cadres et ses investisseurs". Bedoui et Belkecir pointés du doigt Me Kessari Abbas, avocat de Mahieddine Tahkout et bâtonnier de Khenchela, a laissé entendre que son mandant "est victime" de chantage. Il a souligné qu'il a conseillé Mahieddine Tahkout de déposer plainte auprès du procureur de la République près le tribunal de Khenchela "pour chantage et pressions", exercés sur lui "par de hauts responsables". Me Kessari a précisé que l'affaire est toujours en instruction. Même si le bâtonnier n'a pas donné de plus amples informations sur cette histoire dans laquelle Tahkout aurait été entendu par des enquêteurs de la gendarmerie en tant que témoin, d'autres avocats ont cité le nom de Ghali Belkecir, ex-patron de la gendarmerie actuellement en fuite à l'étranger, et de Noureddine Bedoui, ancien ministre de l'Intérieur. "Tahkout a fait face à de terribles pressions exercées par Ghali Belkecir et Noureddine Bedoui", ont affirmé des avocats, précisant que l'enquête ne tardera pas à révéler les dessous de cette affaire qui serait, selon eux, à l'origine des déboires judiciaires du groupe Tahkout. Cette information a, également, été confirmée par le concerné lors de la sa prise de parole à la fin du procès. Mahieddine Tahkout a estimé, en effet, qu'il a été "ciblé par des manœuvres", accusant de hauts responsables d'avoir "exercé sur lui d'énormes pressions et du chantage". "L'affaire est désormais entre les mains de la justice", a-t-il dit, précisant que sa plainte "est en rapport avec l'affaire" pour laquelle il est incarcéré. Durant le procès, Me Sidi-Saïd, avocat de Bilal Tahkout a accusé également Ghali Belkecir et Wassini Bouazza, ex-directeur général de la sécurité intérieure (DGSI) d'être "les instigateurs" des déboires judiciaires de la famille Tahkout. À rappeler que le procureur de la République a requis contre Mahieddine Tahkout 18 ans de prison ferme, une amende de 8 millions de dinars et la saisie de tous ses biens. Il a requis 12 ans d'emprisonnement et une amende de 8 millions de dinars contre chacun des anciens Premiers ministres, Ahmed Ouyahia et Abdelmalek Sellal. 10 ans de prison ferme et une amende de 8 millions de dinars contre Amar Ghoul, Youcef Yousfi et Abdelghani Zaâlane. 8 ans de prison ferme et une amende de 8 millions de dinars ont été requis contre Hamid, Rachid, Nacer et Billel Tahkout. Le procureur a demandé 6 ans de prison ferme et une amende de 3 millions de dinars contre Abdelkader Benmiloud, ancien directeur de l'Etusa. Concernant les personnes morales, le procureur a requis une amende de 32 millions de dinars et la saisie de toutes leurs entreprises.