Des milliers d'agriculteurs indiens en tracteurs ont forcé hier des barrages de la police, essuyant ses tirs de gaz lacrymogènes, pour aller manifester contre les réformes agricoles au centre de New Delhi, où se déroulait la parade militaire du Jour de la République. La police qui avait bloqué la plupart des entrées de la ville avec des conteneurs et des camions a tiré des gaz lacrymogènes contre les agriculteurs qui, parvenus à forcer les barrages, sont entrés dans la ville. Certains manifestants ont gagné un grand carrefour à seulement trois kilomètres du site où le Premier ministre Narendra Modi et les membres du gouvernement assistaient au défilé de la fête nationale. Modi a salué la foule de spectateurs avant de regagner sa résidence, évitant toute confrontation personnelle avec les agriculteurs qui rejettent ses réformes agricoles. Des manifestations plus modestes se sont aussi déroulées à Bombay (ouest) et Bangalore (sud). Ce bras de fer, qui dure depuis des mois constitue l'épreuve la plus dure que le gouvernement nationaliste hindou ait eu à relever au cours de ses six années passées au pouvoir. Des dizaines de milliers d'agriculteurs campent depuis novembre sur les principaux axes routiers aux portes de Delhi et comptaient sur cette journée de fête nationale pour donner un plus large écho à leur lutte contre les réformes conçues pour libéraliser les marchés agricoles. Dix cycles de négociations entre les syndicats agricoles et le gouvernement n'ont pas permis de débloquer la situation. La Cour suprême indienne, plus haute juridiction du pays, a récemment suspendu l'application des réformes agricoles "jusqu'à nouvel ordre" et annoncé la formation d'un comité d'experts pour faciliter la médiation entre les agriculteurs et le gouvernement. Depuis, ce dernier a proposé un gel de la mise en œuvre de ces lois pour 18 mois, mais les agriculteurs exigent leur abrogation pure et simple.