Interpellé mercredi par une sénatrice socialiste sur la situation en Algérie, le chef de la diplomatie française n'a pas dérogé à la règle en réitérant la position officielle de son pays. Une position qui se veut à équidistance du Hirak et du pouvoir, dictée sans doute par les susceptibilités que pourrait provoquer un éventuel alignement. Dans les mêmes éléments de langage développés il y a quelques mois, Jean-Yves Le Drian, qui s'est montré extrêmement prudent, a affirmé que "les autorités algériennes ont exprimé l'ambition de réformer l'Algérie en profondeur, dans un esprit de dialogue et d'ouverture qui correspond aux attentes qui ont été exprimées dans le Hirak, de manière pacifique et avec dignité, par les Algériens". "Notre seul souhait, c'est la réussite des réformes au bénéfice de l'Algérie et des Algériens", a-t-il dit. "C'est aux Algériens, et à eux seuls, de fixer les modalités de ce destin, dans le respect des libertés publiques, dans le respect de la liberté d'expression, dans le respect de la liberté de la presse, auxquelles la France est attachée partout dans le monde", a-t-il encore insisté, en réponse à la sénatrice, en lisant une déclaration sous ses yeux. Sur un ton péremptoire, il ajoute que par "respect à la souveraineté du peuple algérien" qui s'apprête à "voter" dans deux semaines, il n'avait "rien à ajouter". La sénatrice socialiste, Laurence Rossignol, qui l'interrogeait, a rappelé le contexte actuel marqué par des arrestations, des entraves aux libertés et autres atteintes aux droits de l'Homme. Mais le ministre n'a pas bronché, exprimant de nouveau la position constante de la France sur le dossier algérien. Il faut dire que dès la fin 2019, le chef de la diplomatie française soutenait que son pays souhaitait la "poursuite de la transition démocratique". "La France n'a qu'un souhait, et ce n'est pas du tout un souhait diplomatique, c'est que la poursuite de la transition démocratique puisse se faire, dans le respect de la souveraineté algérienne". "Nous pensons que l'Algérie vit un moment crucial et qu'elle passe à une nouvelle phase de son histoire", avait-il dit. Si l'usage du terme "transition" a prêté le flanc à quelques interprétations, ce n'était visiblement pas le cas pour les hautes autorités françaises puisque après un long mutisme, le chef de l'Etat français, Emmanuel Macron, avait affiché, publiquement, son soutien au processus politique en cours en Algérie. Mieux, il avait encensé Abdelmadjid Tebboune dans une interview accordée au magazine Jeune Afrique. Il a déclaré, en effet, qu'il ferait "tout" pour "aider" le président algérien Abdelmadjid Tebboune, qui est "courageux", afin que "la transition réussisse" en Algérie. "Je vous le dis franchement : je ferai tout ce qui est en mon possible pour aider le président Tebboune dans cette période de transition. Il est courageux", avait-il insisté. Mais, ajoute-t-il, "on ne change pas un pays, des institutions et des structures de pouvoir en quelques mois". "Il y a eu un mouvement révolutionnaire, qui est toujours là, sous une forme différente. Il y a aussi une volonté de stabilité, en particulier dans la part la plus rurale de l'Algérie. Il faut tout faire pour que cette transition réussisse. Mais il y a un facteur temps important", avait ajouté Macron dont la neutralité fut bruyante durant les premiers mois du début de la révolte. Mais depuis l'arrivée d'Abdelmadjid Tebboune au pouvoir, il a échangé régulièrement avec lui en affichant un "soutien mutuel". Tebboune avait même qualifié Macron d'homme "honnête". Perçus comme un soutien franc aux autorités algériennes, les propos de Macron avaient suscité des critiques et des protestations parmi l'opposition et parmi les animateurs du mouvement populaire, dont certains activent en France. Karim Tabbou lui avait même adressé une lettre.