Tout laisse croire que le froid est bien installé entre Alger et Paris dès le lendemain de l'élection du président de la République, Abdelmadjid Tebboune. L'absence d'amabilités dans l'échange de mots par conférences de presse interposées entre les deux présidents, français et algérien, fait les choux gras de la presse nationale et internationale. Une atmosphère qui fait planer une nouvelle crise dans les relations bilatérales entre les deux pays. Des relations au plus bas, d'ailleurs, durant ces derniers mois, presque depuis l'annulation du 5e mandat et le déclenchement des manifestations populaires (Hirak). Les évènements en question ont influé sur la position de Paris, poussant au remodelage de ses positions en parfaite synchronisation avec les revendications des manifestants. Ne manquant jamais de rappeler, durant ces 10 derniers mois, que la France se tient aux côtés des Algériens dans leur transition démocratique. Puis, il y a eu cette malheureuse résolution du Parlement européen contre l'Algérie, dont les initiateurs sont des parlementaires français, l'un étant même issu du courant politique du président français, qui a provoqué un tollé général parmi les Algériens de tous bords, rejetant toute ingérence étrangère dans les affaires intérieures de l'Algérie. Et, le tout a été clôturé par le président français, Emmanuel Macron, qui n'a pas daigné féliciter le nouveau président de la République, Abdelmadjid Tebboune, comme le veulent les us et coutumes diplomatiques. Interrogé au lendemain de l'élection présidentielle, Emmanuel Macron, qui sortait d'une réunion du Conseil européen à Bruxelles (Belgique), a répondu qu'il a « pris note de l'annonce officielle que M.Tebboune a remporté l'élection présidentielle algérienne dès le premier tour », ajoutant que « le pouvoir algérien » devrait «ouvrir le dialogue» avec les manifestants pacifiques. De son côté, M. Tebboune n'y est pas allé avec le dos de la cuillère en réagissant à ces propos. Questionné par un journaliste sur cette sortie du président français, M. Tebboune a, de son côté, déclaré « j'ai décidé de ne pas lui répondre ». « Il est libre de vendre sa marchandise dans son pays. Je ne le reconnais pas. Je reconnais seulement le peuple algérien qui a décidé de m'élire comme président», a lancé dans ce sillage M. Tebboune. Notons que M. Tebboune avait déjà, pendant sa campagne électorale, accusé le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Yves Le Drian, d'ingérence dans les affaires internes de l'Algérie. Pour dire que l'accrochage verbal a commencé bien avant l'élection de M. Tebboune, qui a dessiné les contours des relations diplomatiques de l'Algérie nouvelle, qui traitera « d'égal à égal » avec tous les pays et qui « ne badine pas quand il s'agit de la souveraineté » de l'Algérie, soulignera-t-il lors de sa première conférence de presse au lendemain de son élection. Mais, peut-on pour autant avancer que ces remous s'inscrivent dans la durée ? Que la déclaration d'Alger sur l'amitié et la coopération entre la France et l'Algérie, signée en 2012 par les deux prédécesseurs des présidents actuellement en poste, est morte ? Pas évident. Car, les relations entre l'Algérie et la France ont toujours été ponctuées de « divorces » et de « lunes de miel ». Au-delà des liens historiques, passionnels, entre l'Algérie et la France, le partenariat économique (l'Algérie est le premier partenaire commercial de la France en Afrique) et la coopération sécuritaire, pour ne citer que ces deux volets, sont si importants, qu'on ne pourrait toucher aux intérêts qui en découlent sans provoquer des effets désastreux pour les deux pays. Ce sont les intérêts, pas les humeurs, qui finiront certainement par avoir le dernier mot de l'histoire.