Malgré tous les efforts politiques, diplomatiques et militaires déployés par la communauté internationale, le Mali peine à retrouver une stabilité durable. Les crises successives du pouvoir ont rendu le règlement définitif du conflit du Nord extrêmement difficile et font s'éloigner les chances de la paix. Intervenant dans un contexte politique de grande incertitude, le 6e anniversaire de la signature de l'Accord d'Alger remet sur le tapis un certain nombre de questions sur la mise en œuvre de ce texte, qu'une partie des Maliens veut réviser et adapter à la nouvelle donne à Bamako. La mise en œuvre de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d'Alger, traîne toujours, six ans après sa signature à Bamako le 20 juin 2015, malgré les efforts de la communauté internationale de le faire aboutir dans les meilleurs délais. Englobant le règlement sécuritaire et politique d'une crise qui a opposé dès 2012 l'ex-rébellion targuie aux autorités de Bamako, ce texte avait intégré la dimension sociale et économique pour en finir avec les velléités séparatistes des acteurs politiques et militaires du nord du pays et avec les injustices qui sont mises en avant pour justifier le "rêve" d'un Azawad indépendant que les Touareg nourrissent depuis plus d'un demi-siècle. Menée parallèlement à la lutte contre le terrorisme dans le nord du pays, au bilan très discutable d'ailleurs, l'application de l'Accord de paix a peu avancé sur ce deuxième terrain social et économique. La population du Nord attend toujours sa part de développement économique, tant promis par Bamako, et dont l'administration a du mal aussi à se redéployer, laissant le champ libre à une large autonomie de gestion à la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA, ex-rébellion), notamment dans la ville-clé de Kidal, à dominante targuie. Malgré l'installation d'un nouveau gouverneur dans la ville, son champ d'action demeure très limité et sa sécurité est assurée par les éléments armés de la CMA. Sur le plan sécuritaire, les populations isolées subissent quotidiennement les affres du terrorisme d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), mais aussi de l'autoproclamé Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS), en plus du banditisme qui, par ailleurs, alimente les violences tribales, très répandues au Mali. Il y a aussi la question des déplacés du Nord, dont une partie est toujours réfugiée dans les pays voisins. Selon les chiffres de l'Onu, datant de février 2021, plus de 358 212 personnes sont considérées comme déplacées internes ou réfugiées dans les pays voisins. Certes, quelques avancées symboliques sont à signaler autant sur le plan politique que sécuritaire, mais elles restent symboliques et géographiquement limitées à quelques zones où la présence des forces armées n'a, toutefois, pas réussi à éradiquer totalement la menace terroriste et les violences intercommunautaires. La présence des forces étrangères, dans le cadre du maintien de la paix, n'a pu, non plus, endiguer le phénomène terroriste, qui profite d'ailleurs de la situation sociale et de l'instabilité politique chronique à Bamako pour étendre ses tentacules jusqu'au sud du pays. Profitant de la porosité des frontières et de l'instabilité en Libye, les groupes terroristes contribuent d'une manière directe et indirecte au blocage de la mise en œuvre de l'Accord d'Alger. Reste maintenant à savoir si les autorités de transition, dirigées par les militaires putschistes, sont prêtes à donner une nouvelle dynamique à cet accord, surtout après avoir réussi à obtenir la confiance du principal signataire du texte, la CMA. Dès les premiers jours ayant suivi le coup d'Etat militaire contre l'ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, le 18 août 2020, l'Algérie avait dépêché son chef de la diplomatie, Sabri Boukadoum, qui s'est rendu plusieurs fois à Bamako depuis pour s'assurer du respect de cet accord par les autorités de transition. Mercredi dernier, le président de la transition au Mali, Assimi Goïta, a déclaré que son équipe aura pour mission de poursuivre le travail de mise en œuvre intelligente et efficiente de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d'Alger, en vue de créer les conditions optimales d'une paix durable, selon le communiqué du Conseil des ministres, relayé par l'agence de presse malienne (Amap).