Les discussions s'annoncent en effet tendues entre des partis que beaucoup oppose, notamment en termes de fiscalité, avec des libéraux opposés aux hausses d'impôts envisagées par le SPD. Sociaux-démocrates, Verts et libéraux allemands vont entamer aujourd'hui des discussions préliminaires pour tenter de former une coalition inédite et sans les conservateurs d'Angela Merkel, même si leur chef de file ne s'avoue toujours pas vaincu. Dix jours après des élections remportées d'une courte tête par les sociaux-démocrates du SPD, les tractations en coulisse s'accélèrent en Allemagne, encore marquée par les mois de paralysie des dernières législatives de 2017 en raison d'interminables négociations. Les écologistes, arrivés en troisième position du scrutin du 26 septembre, ont ainsi annoncé qu'ils souhaitaient approfondir les pourparlers avec les seuls SPD et FDP (libéraux). "Les discussions de ces dernières semaines ont montré que les plus grandes intersections en termes de contenu sont concevables dans ce schéma (avec le SPD et le FDP), notamment dans le domaine de la politique sociale", a souligné un coprésident du parti écologiste, Robert Habeck. Les libéraux du FDP ont, dans la foulée, saisi la main tendue par les écologistes, bien qu'ils n'aient pas caché ces dernières semaines pencher plutôt pour une alliance avec les conservateurs. Le FDP a ainsi proposé au SPD et aux Verts une rencontre aujourd'hui pour entamer des discussions préliminaires pour dessiner les contours d'un futur gouvernement de "centre progressiste", selon son dirigeant, Christian Lindner. Une proposition également acceptée par le SPD, en mesure de reconquérir la chancellerie pour la première fois depuis le départ de Gerhard Schröder en 2005. "Les citoyens nous ont donné un mandat pour mettre sur pied un gouvernement ensemble", s'est réjoui le chef de file des sociaux-démocrates, Olaf Scholz, saluant la décision des deux partis. Ces discussions préliminaires ne signifient pas pour autant que la coalition "feu tricolore", d'après la couleur de chacun des trois partis, sera formée et qu'Olaf Scholz succèdera à la chancellerie à Angela Merkel, en poste depuis 2005. "Le biscuit est loin d'être mangé" et l'accord n'est pas ficelé, a ainsi tempéré M. Habeck. M. Lindner a, lui, souligné qu'une coalition "jamaïcaine" avec les écologistes et les chrétiens-démocrates (CDU) de la chancelière, en référence là aussi aux couleurs des trois formations, restait "une option viable en termes de contenu". Les discussions s'annoncent en effet tendues entre des partis que beaucoup oppose, notamment en termes de fiscalité, avec des libéraux opposés aux hausses d'impôts envisagées par le SPD. Une coalition à trois partis serait de surcroît une première en Allemagne depuis 1950, et par définition plus instable que l'alliance de deux formations. La CDU, menée par l'impopulaire Armin Laschet, n'a, quant à elle, pas renoncé à tenter de former une coalition dite "jamaïcaine" et à conserver la chancellerie. Hier, l'ancien journaliste de 60 ans a dit respecter la décision des Verts et du FDP de privilégier des discussions avec le SPD. Mais il a aussi réaffirmé "être prêt" à mener des pourparlers avec ces deux petits partis "faiseurs de chancelier". Markus Söder, le chef du parti bavarois allié CSU, semble, lui, s'être fait une raison. La décision est "un clair rejet de la coalition jamaïcaine", a-t-il analysé, jugeant que s'ouvrait pour les conservateurs "une période à laquelle il faut nous préparer", une probable cure d'opposition après 16 années d'ère Merkel. En marge d'un sommet UE-Balkans, la chancelière elle-même a douché les espoirs conservateurs, en relevant que son camp n'avait pas "le meilleur résultat électoral" pour pouvoir prétendre à former une coalition.