Dix jours après le début de la campagne électorale, la polémique enfle autour du rôle de l'Autorité nationale indépendante des élections (Anie) comme l'attestent les tirs groupés qu'elle essuie de la part des chefs des partis politiques et des candidats indépendants engagés dans la compétition. Malgré les démentis de son président, Mohamed Charfi, l'Anie a continué à "filtrer" les listes des candidats aux élections locales plusieurs jours après le début de la campagne électorale. Pourtant, logiquement, le début de la campagne électorale est synonyme de la clôture des listes électorales de chaque parti politique ou des indépendants. Mais cela n'a pas été le cas. Des formations politiques se sont d'ailleurs plaintes de "rejets arbitraires" de leurs candidats par l'Anie, malgré des avis favorables du Conseil d'Etat. C'est le cas, par exemple, du Front des forces socialistes (FFS) qui a chargé, il y a quelques jours, à travers un communiqué, l'autorité de Mohamed Charfi. Mais depuis, les choses sont rentrées dans l'ordre, selon Walid Zanabi, chargé de communication par intérim de cette formation politique. "Deux de nos candidats à Alger ont été éliminés, malgré une réhabilitation par le Conseil d'Etat. Mais depuis que les faits ont été dénoncés dans un communiqué, l'Anie s'est rétractée", a-t-il précisé. D'autres partis politiques n'ont, cependant, pas eu cette chance, à l'image du Mouvement de la société pour la paix (MSP). "Plusieurs de nos candidats ont été réhabilités par le Conseil d'Etat. Mais les responsables locaux de l'Anie ont quand même décidé de rejeter ces candidatures", a indiqué le chargé de communication de cette formation, Nacer Hamdadouche, contacté par téléphone. "Mais cela fait désormais partie du passé", a-t-il appuyé. Malgré cela, le président de ce parti, Abderrezak Makri, continue de dénoncer "l'arbitraire". C'est ce qu'il a fait, hier, lors d'un meeting animé à M'sila, sa ville natale. Ces choix contestés et controversés de l'Anie ne touchent pas uniquement les partis de l'opposition. Même le FLN et le RND en ont fait les frais en attribuant ces pratiques à la "îssaba". Hier, depuis la ville de Chlef où il animait un meeting, Tayeb Zitouni, secrétaire général du RND, a dénoncé des partis, dont il ne précise pas l'identité, qui veulent "empêcher des candidatures" et qui "ne veulent pas du bien pour le pays", après l'élimination des candidats de son parti. Pour sa part, le secrétaire général du FLN, Abou El-Fadhl Baâdji, avait dénoncé, lors d'une conférence de presse animée la veille du début de la campagne électorale, des "agissements individuels" de certains responsables de l'Anie. "Nous avons des exemples précis où le Conseil d'Etat a réhabilité des candidats. Mais les responsables de l'Anie les ont rejetés sur la base de l'article 184" de la loi électorale qui énumère des conditions, souvent ambiguës, de l'exclusion de certains candidats à des élections. En tout, une source bien informée indique que l'Anie a éliminé plus de 83 candidats déjà réhabilités par la justice. Dans une réaction à ces accusations, l'Anie a simplement expliqué que les candidats écartés l'étaient "avant" l'intervention de la justice. Dans une déclaration faite à la presse jeudi dernier, M. Charfi a fait état de "37 dossiers soumis au Conseil d'Etat, dont un dossier réexaminé par l'Anie, les autres dossiers réexaminés étant ceux des candidats non validés par l'Anie, en vertu de ses prérogatives". Qu'elles soient fondées ou conjoncturelles, ces accusations plombent le crédit de cette instance dont les conditions ayant entouré sa création avaient déjà suscité des polémiques. Elle est née en 2019 sans aucune assise légale.