La présidence de la République a instruit les services concernés d'ouvrir une enquête sur la gestion du syndicat des pétroliers. Un syndicat jugé hors la loi par des syndicalistes en rupture de ban car son mandat a expiré depuis plusieurs mois. Ce dernier s'en défend : il exige le licenciement du syndicaliste. La gestion du syndicat national de Sonatrach, décriée par plusieurs syndicalistes et parfois même par des hommes politiques, semble intéresser les enquêteurs. Selon des sources généralement sûres, la présidence de la République a ordonné l'ouverture d'une enquête afin de vérifier la véracité des éléments d'un lourd dossier où les responsables du syndicat de Sonatrach, et à un degré moindre certains cadres de la centrale seraient impliqués. L'enquête a été confiée à la section des recherches et investigations de Ouargla. Selon ces mêmes sources, la présidence de la République, déjà au fait de certaines pratiques dans le secteur, notamment à travers les rapports des différentes administrations, a ordonné l'ouverture d'une enquête, cette fois-ci, suite à une lettre ouverte d'un ex-cadre syndical qui, il faut le reconnaître, n'a pas requis l'anonymat. Les enquêteurs de la gendarmerie ont commencé leurs investigations dès la fin du mois de juillet dernier pour éplucher les centaines de feuilles de rapport remises par l'ex-cadre syndical — H. Bouanane —, c'est de lui qu'il s'agit, nous a confirmé l'information. “Oui, j'ai remis à qui de droit des dossiers d'accusation relatifs à des dilapidations et autres délits enregistrés au sein du Snes (Syndicat national de l'entreprise Sonatrach), ils sont accablants et sans aucune offense pour qui que ce soit.” L'ex-syndicaliste ne met pas de gants en précisant : “Nos mœurs syndicales sont essentiellement focalisées sur le pouvoir et son partage au détriment de tout autre action éthique et le Snes n'échappe pas à la règle.” Les griefs retenus contre la direction du syndicat sont multiples et ils vont des dérapages organiques à, carrément, selon l'ex-syndicaliste, la dilapidation des biens sociaux. Le rapport transmis à la présidence de la République, cite l'implication du syndicat dans le scandale de l'entreprise multiservices (EMS) qui faisait, entre autres, fonction de boîte de recrutement des travailleurs pour Sonatrach dans le Sud et que Liberté a mis à nu lors des émeutes qu'a connues le sud du pays le 21 février dernier. Il évoque également des cas de dilapidation au sein des œuvres sociales de Sonatrach dont le budget dépasse le budget même de certains pays sous-développés. Il fait aussi cas de la gestion de la mutuelle sociale de l'industrie du pétrole. Une mutuelle où, selon un dossier consistant, serait victime de graves délits d'abus sociaux. Pour rappel, rien que dans le crash du groupe Khalifa, la mutuelle a perdu la somme de 300 milliards de centimes sans que les responsabilités soient situées. Pour la direction du syndicat, “l'action de M. Bouanane est une continuité des tentatives de déstabilisation ayant visé le syndicat national durant les mois écoulés. Il n'y a pas de doutes, ce monsieur verse dans les manigances et manipulations orchestrées par des parties aux desseins obscurs que le calme et la sérénité au sein de Sonatrach dérangent”, lit-on dans une lettre adressée au P-DG de Sonatrach et dans laquelle, il est demandé “le licenciement sans indemnités ni préavis pour atteinte à libre exercice de droit syndical et perturbation du climat syndical”. Des travailleurs qui demandent à leur employeur le licenciement d'un des leurs ! Voilà un fait inadmissible dans les pratiques syndicales. Il s'agit, selon plusieurs témoignages, de pratiques courantes de plusieurs entreprises publiques. Toutefois, si l'intéressé n'a pas encore perdu son gagne-pain car le P-DG de Sonatrach a jugé le problème d'ordre syndical, l'intéressé a été exclu de toutes les instances syndicales. Mais ce qui rend la chose plus délicate, c'est que l'actuel syndicat est depuis plus de 4 mois illégitime et aussi bien sa présence que ses activités sont sans valeur juridique. En effet, le mandat du secrétariat national de Sonatrach a expiré le 25 juin dernier. Mais ce dernier est toujours sur place sans être dissous, ce qui est une grave atteinte au règlement intérieur de la centrale, notamment son article 169 et principe élémentaire de l'éthique syndicale. Mourad KEZZAR