La junte au pouvoir à Bamako a décidé de reprendre langue avec les voisins ouest-africains qui ont imposé un embargo diplomatique et économique contre le Mali depuis le 9 janvier dernier, après la décision de son chef de prolonger de cinq ans la période de transition, censée s'achever ce mois-ci avec la tenue d'une nouvelle élection présidentielle reportée à une date ultérieure. Dans le communiqué de mercredi soir, le ministère de l'Administration territoriale malienne a indiqué qu'un "groupe de dialogue" s'était réuni le 31 janvier au niveau ministériel. Ce groupe vise "à un rapprochement de positions et à la recherche de compromis" avec la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), dit-il. Tout en confirmant l'information, la Cédéao a précisé que ce groupe de travail n'a pas encore été mis en place. "La Commission de la Cédéao prend acte du communiqué du 9 février 2022 du gouvernement du Mali relatif au mécanisme pour la poursuite du dialogue avec la Cédéao et qui affirme également l'engagement des autorités de la transition à œuvrer pour un retour à un ordre constitutionnel normal" à Bamako, lit-on dans le communiqué de l'organisation ouest-africaine, dont les sanctions imposées au Mali ont été appuyées par l'Union africaine. "La Commission rappelle que des consultations au niveau technique se tiennent actuellement entre les autorités maliennes et le Comité local de suivi de la transition (comprenant la Cédéao, l'Union africaine, les Nations unies, le Ghana et le Nigeria), assisté d'experts sur le chronogramme des élections", précise le communiqué en question, soulignant que, "cependant, le groupe de travail au niveau ministériel n'a pas été mis en place à ce jour". Autrement dit, la situation n'avance pas trop entre les deux parties et la volonté des militaires maliens à prolonger aussi longtemps que possible la période de transition pose un sérieux problème pour la Cédéao, qui veut une date fixe pour la tenue des élections, dans les meilleurs délais que les cinq ans décidés par le colonel Assimi Goïta, chef de la junte et président de transition à Bamako. Car, pour les autorités de transition, les élections ne sont pas plus importantes que la consolidation d'une transition, qui traîne en longueur depuis le putsch ayant conduit à l'éviction du défunt président Ibrahim Boubacar Keïta, le 14 août 2020. Assimi Goïta avait profité de la forte pression de la rue contre IBK pour s'incruster sur la scène politique et prendre le pouvoir à Bamako, menant un deuxième coup d'Etat contre le président et le gouvernement de transition qu'il avait lui-même mis en place quelques mois plus tard. "On ne peut pas ramener raisonnablement la transition, sauf à être dans une approche réductrice, parcellaire ou binaire, à la tenue seulement et uniquement d'élections, en occultant le fait que depuis 1992 notre pays a régulièrement organisé divers scrutins, qui ne l'ont pourtant pas épargné des ruptures à répétition de l'ordre constitutionnel", a tenté de se justifier récemment le Premier ministre du gouvernement de transition, Choguel Kokalla Maïga, qui était, au fort de la crise contre IBK, dans le camp de l'opposition, au sein du mouvement de contestation dirigé à l'époque par l'influent imam Mahmoud Dicko. Ce mouvement n'a d'ailleurs pas renoncé à ses revendications, même si la pandémie de coronavirus a contraint tout le monde à rester chez soi. M. Kokalla Maïga accuse la Cédéao d'avoir "cette volonté acharnée, sous le couvert de la préservation de l'ordre constitutionnel, de certains chefs d'Etat de vouloir vassaliser le peuple malien pour le compte de l'agenda caché de puissances extra-africaines, profitant du fait qu'aujourd'hui l'Etat malien est affaibli, ébranlé dans ses fondements et se trouve à terre, pour des raisons sur lesquelles il n'est nullement besoin de s'attarder, car suffisamment connues de tous les observateurs avisés".