Chirac et Blair parviendront-ils à aplanir leurs profondes divergences apparues au grand jour, sur le dossier irakien ? Initialement programmé pour le 3 décembre dernier, ce sommet a été reporté à cause du désaccord né entre le président français et le premier ministre britannique lors du sommet de l'Union européenne à Bruxelles, en octobre 2002, sur la politique agricole commune. Pour rappel, Chirac avait remis en cause la “ristourne” dont bénéficie la Grande-Bretagne dans le budget de l'UE. L'invitation adressée par l'Elysée au président du Zimbabwe, Robert Mugabe, malgré les sanctions européennes dont il fait l'objet après qu'il eut exproprié les fermiers blancs (beaucoup de Britanniques), a fortement déplu au locataire de Downing street. Une réconciliation de “façade” a eu lieu entre les deux dirigeants, le 22 décembre dernier à Prague, au sommet de l'Otan. Le dossier irakien est venu raviver la tension entre les deux Etats. Les discussions d'aujourd'hui entre les deux parties porteront essentiellement sur l'Irak, qui constitue la pomme de discorde dans leurs relations bilatérales depuis que Paris s'oppose fermement à l'usage de la force contre Bagdad, tandis que Londres épouse la position américaine et se prépare à la guerre. La France tente de minimiser les divergences, particulièrement après la lettre “d'allégeance” des huit pays européens sous la direction de Tony Blair, qualifiée de véritable rebuffade pour Jacques Chirac et Gerhard Schroeder. Dans les deux capitales, on essaie de dépassionner les débats, en faisant croire que l'essentiel de cette rencontre sera axé sur les relations franco-britanniques. L'Elysée tient à rappeler que les deux pays ont beaucoup d'intérêts communs, et même le problème irakien n'altérera pas les bonnes relations entre Londres et Paris. Idem du côté britannique, où l'on soutient que la France et la Grande-Bretagne étaient sur la même longueur d'ondes pour adopter la résolution 1 441 du Conseil de sécurité et pourraient s'entendre à nouveau sur le vote d'une seconde résolution de l'ONU avant une guerre contre l'Irak. Ceci dit, Tony Blair présentera certainement au président français un compte rendu de son séjour américain, où il s'est entendu avec George Bush pour fixer un ultimatum au régime irakien avant de recourir à la force, comme le souhaite ardemment le chef de la Maison-Blanche. Il aura toutes les peines du monde à faire changer d'avis à Jacques Chirac, dont le souci majeur est de mettre à mal l'hégémonie exercée par les Etats-Unis sur la planète. Une chose est cependant sûre, ce sommet sera un avant-goût de la réunion du Conseil de sécurité de demain durant laquelle Colin Powell présentera les preuves américaines contre Bagdad. K. A.