La visite du président Roh Moo-Hyun s'est achevée. L'Algérie et la Corée du Sud ont, à l'occasion, signé une déclaration de partenariat stratégique. L'Algérie avait fait de même avec la Russie, mais cela n'a pas empêché la visite de Poutine de susciter une crise. C'est que, là aussi, le traité d'amitié doit être un recueil de bonnes intentions qui n'engagent sur aucune association concrète. Ce genre de documents ne connaît pas de diffusion particulière, et très peu de monde en prend connaissance. Ce ne sont pas les intitulés ronflants qui engendrent leur efficacité. C'est même justement pour couvrir leur stérilité en termes de coopération qu'ils affectent des intitulés suggestifs. Quand des commentateurs traduisent un tel accord par le binôme “hydrocarbures contre technologie”, c'est qu'ils ne font que prendre acte de la nature des échanges possibles entre les deux pays et qui préexistaient à tout protocole d'Etat. Nous n'avons pas que des hydrocarbures à offrir, et les Coréens n'ont que l'automobile et l'électroménager à proposer. Et du bâtiment. Du bâtiment, il y en a pour tous ceux qui veulent bien puisque l'Algérie a un besoin de plus de un million de logements et de quoi les financer. La stratégie constitue, d'après certaines définitions, un effort de conception qui vise à réunir les moyens d'atteindre des objectifs décisifs. Il serait intéressant de nous faire connaître la communauté, ou tout au moins la complémentarité, de ces objectifs partagés, avant de nous faire part de la déclaration. Sinon, cela voudrait dire que dans l'accord en question, il y a plus de déclarations que de stratégies. En un mot, il s'agirait de simples professions de foi. Souvent, en diplomatie, l'échange de discours tente de pallier le déficit de coopération. Ainsi, dans nos rapports avec la France, nous sommes passés ces dernières années de la “refondation des relations algéro-françaises” au “partenariat d'exception”, et “la déclaration d'Alger” attend toujours d'être couronnée par “le traité d'amitié”, le tout dans un immobilisme bruyant et remuant qui dure depuis six ans. Les discours et les textes n'ont toujours pas réussi à se transformer en partenariat opérationnel. Et certains partenaires se prêtent avec une telle complaisance à ces exercices de langue de bois ! On a commencé par célébrer un partenariat avant d'en concevoir le contenu. La langue de bois a investi nos relations diplomatiques. Et son effet magique fait croire que ce qui se dit, même s'il n'est pas fait, va se faire. L'acte, ainsi conçu comme l'alibi du discours, en devient secondaire. “L'accord” prend le pas sur le partenariat. Et le “stratégique” n'est plus qu'un superlatif. Quand avec le temps on se rend compte de l'improductivité de la démarche, on s'irrite parfois que les entreprises étrangères tardent à s'investir dans notre projet de développement. On a cru que la sollicitation seule attirerait les capitaux et nous dispenserait de réformer notre contexte. On oublie que le rôle de l'Etat n'est plus de produire de la coopération, mais de mettre en place les conditions de cette coopération. M. H.