Les membres de la Coordination nationale des ports d'Algérie (CNPA) se sont réunis, hier matin, à l'hôtel Kettani de Bab El-Oued. Cette session extraordinaire, convoquée à l'initiative de la présidence de la coordination, a vu la participation des responsables des conseils syndicaux des 10 enceintes portuaires du pays. Mohamed Badredine, secrétaire national au sein de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), a également pris part à la rencontre. Une résolution importante a sanctionné les débats. À l'unanimité, les syndicalistes ont voté en faveur de deux journées d'arrêt de travail les 16 et 17 avril prochains. Une copie du procès-verbal ainsi qu'un préavis de grève devaient être déposés en fin de journée auprès des services compétents. À l'origine de cette escalade des dockers et des marins, l'adoption par le conseil de gouvernement, il y a une semaine, du décret portant ouverture des opérations commerciales, comme le remorquage, la maintenance et l'acconage aux privés nationaux et étrangers. En dépit de la mise en place de garde-fous, comme le maintien de l'activité de régulation sous l'autorité de l'Etat, les représentants des 15 000 travailleurs des ports dénoncent une privatisation pure et dure qui, à moyen terme, constitue une menace pour les emplois. “Ils (les pouvoirs publics, ndlr) ont créé un séisme, nous produisons des répliques”, épilogue M. Driss, mi-ironique, mi- amer. Cette figure de proue du syndicat du port d'Oran, devenu président de la CNPA depuis janvier dernier, n'en démord pas. “Si notre grève n'aboutit pas, nous envisagerons d'autres actions”, promet-il. Il y a quelques mois, la coordination avait fait parler d'elle en se lançant dans des bras de fer répétés avec l'employeur. L'intervention du SG de l'UGTA, Abdelmadjid Sidi-Saïd, mais surtout l'ajournement du projet de privatisation par le gouvernement avaient conduit les syndicats à une trêve qui, finalement, aura été de courte durée. La coordination demande ni plus ni moins le retrait du décret portant réforme des ports. “On ne privatise pas quelque chose qui marche bien. Les ports sont en bonne santé financière”, observe M. Driss. Selon lui, les activités portuaires engendrent annuellement 800 milliards de centimes au trésor public. Considérant l'objectif de la privatisation comme absurde et injustifié, le syndicaliste conteste également la méthode employée par les autorités qu'il qualifie de “totalitaire”. “Les travailleurs n'ont jamais été consultés. Nous regrettons le mépris du gouvernement”, relate-t-il. Informés de l'intention des syndicalistes à déterrer la hache de guerre, les pouvoirs publics gardent néanmoins le silence. Il y a moins d'un an, le chef de l'exécutif, Ahmed Ouyahia, s'exprimait sur le sujet, assurant qu'“aucun bruit, ni aucune ébullition ne sauraient arrêter le train des réformes”. Défendant son projet, il faisait valoir ses dividendes sur le plan de la rentabilité économique. Au chapitre social, toutefois, le chef du gouvernement n'a pas tenté de rassurer les travailleurs quant à leur avenir. “Le gouvernement s'occupe de politique, les holdings d'économie, les syndicats du social”, commente M. Driss. Aussi s'y emploie-t-il. Samia Lokmane