Les représentants des conseils syndicaux des 14 ports du pays sont convoqués à une réunion extraordinaire de la coordination qui se tiendra les 5 et 6 avril à Zéralda, pour décider d'une action de protestation, face à la volonté du gouvernement, réaffirmée lors du Conseil de mercredi dernier, de privatiser les enceintes portuaires. “Ouyahia n'est pas de Villepin. Personne ne doit nous imposer ses lois. Nous rejetons la privatisation quelle que soit sa forme”, avertit M. Driss, président de la Coordination nationale des ports commerciaux d'Algérie (CNPCA). L'examen et l'adoption mercredi dernier par le conseil de gouvernement du décret exécutif fixant les conditions d'exercice des activités de remorquage, de manutention et d'acconage dans les ports de commerce lui inspirent plus d'un commentaire. D'ores et déjà, la riposte s'organise. Les représentants des conseils syndicaux des 14 ports du pays sont convoqués à une réunion extraordinaire de la coordination qui se tiendra les 5 et 6 avril (soit le week-end prochain) à Zéralda. Fort du soutien et de la mobilisation de plus de 15 000 travailleurs, M. Driss n'exclut pas une paralysie des enceintes portuaires afin de contraindre le gouvernement à réviser sa démarche. Elu à la tête de la coordination en décembre dernier, il a fait ses preuves au sein du syndicat du port d'Oran qui s'est illustré par diverses actions de protestation, dont une grève de deux jours en septembre 2005. “Le ministère (des transports, ndlr) fait de la politique, la holding et Sogeport (Société de gestion des participations de l'Etat “port”) de l'économie. Mais les travailleurs qui s'en occupe ? Qui se soucie de leur sort, si demain le privé décide des compressions ?” se demande le responsable syndical. Selon lui, la concession décidée par l'exécutif est injustifiée, du moins sur le plan de la rentabilité car depuis quelques années, les ports font des bénéfices. Une opinion que ne partage pas le chef du gouvernement qui, pour sa part, se plaint de l'anarchie et de la gabegie dans lesquelles les entreprises portuaires sont gérées. “Nos ports ne sauraient demeurer dans un état qui fait que le coût de transport d'un conteneur entre l'Europe et l'Algérie est de 1 000 dollars alors qu'ailleurs, entre les Etats-Unis et l'Europe, ce coût n'est que de 400 dollars pour une distance double. Voilà pourquoi nous œuvrons à attirer des partenaires en étant disposés à leur céder une part du capital de nos compagnies”, faisait-il remarquer aux députés, lors de la présentation de sa déclaration de politique générale en mai 2005. Sa réplique avait anticipé des tentatives de blocage des ports du pays, initiées par la coordination. La dernière programmée en décembre avait été désamorcée suite à l'implication dans le conflit de Abdelmadjid Sidi-Saïd, secrétaire général de l'Union nationale des travailleurs algériens (UGTA). Indifférent à la colère des syndicalistes, Ahmed Ouyahia avait clairement annoncé la couleur en soutenant qu'“aucun bruit, ni aucune ébullition ne sauraient arrêter le train des réformes”. Tel qu'explicité par le dernier décret, cette réforme prévoit la séparation des activités de régulation et de commerce. Il est entendu que la première reste sous l'autorité de la puissance publique alors que la seconde est dévolue aux privés nationaux ou étrangers. L'exercice de ces opérations (remorquage, manutention, acconage) demeurera assujetti à une autorisation matérialisée par une convention entre l'autorité portuaire concernée et les opérateurs retenus, sur la base d'un cahier des charges approuvé par le ministère des transports, qui est également chargé de réguler ces activités dans un souci de sécurité, de sûreté et de meilleure exploitation, stipule la nouvelle loi. Samia Lokmane