Selon le secrétaire général du RND, qui s'exprimait hier au Forum de l'ENTV, “un régime présidentiel ne facilitera pas la gestion des affaires de l'Etat”. Il a également évoqué les prochaines échéances électorales, ainsi que l'état des relations algéro-françaises. Invité hier du Forum de l'ENTV, Ahmed Ouyahia s'est présenté comme le secrétaire général du RND, laissant — comme il a tenu à le noter — sa casquette de Chef du gouvernement dans les vestiaires. Cette position ne l'a pas empêché, pourtant, à répondre généreusement aux nombreuses questions des journalistes, qui en appellent directement à ses fonctions à la tête de l'Exécutif. Comme attendu, Ahmed Ouyahia a été interpellé, dès le début de la conférence, sur le coup de colère du président de la République quant aux défaillances de quelques ministres, dont certains appartiennent au RND. Il a alors affirmé que “la gestion des affaires de l'Etat est un enfer”, comme pour justifier les insuffisances dont font preuve quelques membres de son équipe. “Le président de la République a exprimé sa préoccupation face au retard accusé dans la réalisation du nouvel aéroport international d'Alger. Mais il a reconnu que cette infrastructure est devenue une réalité palpable”, a ajouté le Chef du gouvernement, dans une nouvelle tentative de défendre ses ministres, tout en abondant dans le sens du chef de l'Etat. Il a fini, néanmoins, par avouer implicitement son impuissance à garder les choses en l'état si le premier magistrat du pays en décide autrement. “Pour nous, le gouvernement est comme l'équipe nationale. C'est toute l'équipe qui nous importe et non de perdre deux ou trois joueurs.” Cette déclaration sibylline annonce-t-elle un imminent remaniement ministériel ? “Tout changement au gouvernement est connu uniquement par le président de la République. ça deviendra vérité quand il l'annoncera”, a répliqué M. Ouyahia. Fidèle à la position qu'il a adoptée il y a deux ans, le patron du RND a défendu l'alliance présidentielle, en soutenant que la démarche prônée par les trois formations politiques (RND, FLN et MSP) a prouvé qu'il était possible de former des coalitions en Algérie, comme c'est le cas un peu partout dans le monde. Il a cité, pour mieux étayer ses propos, l'expérience récente de l'Italie en la matière. Il a catégoriquement exclu l'élargissement de cette alliance à d'autres formations politiques. “L'expérience est encore récente. Et puis aucun parti agréé ne peut rejoindre l'alliance présidentielle”, a-t-il avancé, en ce sens que nul parti ne saurait prétendre, pour l'heure du moins, avoir le poids politique dont se targuent les trois formations conglomérées autour du programme du président Bouteflika. La fierté d'Ahmed Ouyahia pour l'alliance présidentielle est démentie par la réalité du terrain, que lui-même n'a pas réussi à occulter. Il a reconnu que la coalition se maintient au sommet. “Nous l'étalerons à d'autres niveaux dès que les conditions politiques le permettront.” Il a éludé, par ailleurs, la question relative à l'engagement des trois partis dans la course électorale pour les législatives avec des listes communes, au motif qu'il était encore tôt pour l'aborder. Sur les divergences avérées sur des questions fondamentales, le secrétaire général du Rassemblement national démocratique a souligné que “chaque parti défend et appréhende l'alliance présidentielle à sa façon”. Pourtant, il ne manquera pas de réitérer son opposition à une révision de la loi fondamentale, laquelle est considérée comme le cheval de bataille du plus vieux parti du pays. “Nous ne cherchons pas la polémique avec le FLN. Mais pour notre part, nous ne voyons pas l'intérêt d'une révision constitutionnelle. Nous ne pensons pas qu'un régime présidentiel facilite la gestion des affaires de l'Etat”. Certainement pour éviter une interprétation biaisée de ses propos, il a précisé que son parti a soutenu, par conviction, la candidature d'Abdelaziz Bouteflika à deux mandats et qu'il n'hésitera pas à renouveler son engagement une troisième fois s'il le faut. “Si c'est l'article 74 de la Constitution qui pose problème (il stipule qu'un président de la République n'a pas le droit d'assurer plus de deux mandats, ndlr), il suffira de réunir les deux Chambres du Parlement pour le modifier.” Le premier responsable du RND a carrément esquivé la question portant sur son intention de se porter candidat à la magistrature suprême si le président Bouteflika ne brigue pas un autre mandat. “J'ai une règle dans la vie : à chaque jour suffit sa peine. Mes préoccupations actuelles sont très loin des projets électoraux.” Au chapitre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, Ahmed Ouyahia a réitéré son soutien à cette politique initiée par le chef de l'Etat. “Au RND, nous restons éradicateurs, mais nous voulons surtout la fin du terrorisme quel que soit le moyen utilisé pour atteindre cet objectif. Nous défendons donc à la lettre et à l'esprit la charte”. Dans la foulée, il a fustigé ceux qui manipulent les Patriotes, les familles des victimes du terrorisme et celles des disparus, parce qu'ils ne peuvent pas s'attaquer frontalement à la charte. “C'est faux de croire que les Patriotes sont les oubliés de la charte. Le document leur rend hommage et défend leurs intérêts dans trois articles. L'Etat n'est pas ingrat. Il indemnisera les Patriotes au moment opportun.” Il n'a montré, a contrario, aucune gêne à annoncer que les portes de son parti resteront à jamais hermétiques aux terroristes y compris ceux qui ont bénéficié des largesses de la démarche présidentielle. “La Charte pour la paix et la réconciliation nationale n'exige pas du RND de s'ouvrir aux terroristes, aux harkis ni aux personnes qui ont eu des démêlés avec la justice”, a asséné le secrétaire général du parti. Souhila H.